Petit guide pratique pour parents stressés

Les parents d’ados/jeunes adultes du XXIe siècle sont souvent des amateurs de cannabis du XXe siècle. Teufeurs chépers, clubbers poudrés ou héroïnomanes substitués, ils ne semblent pourtant pas toujours mieux armés pour parler drogues à leur progéniture. Alors qu’Internet colporte le meilleur et le pire de l’information et du conseil, la propagande prohibitionniste reste majoritaire sur les autres médias. Et si les structures de RdR font un gros travail de terrain, parents angoissés et enfants mal formés aux drogues et aux addictions sont encore bien trop nombreux.

Just Say No ou ne rien dire du tout

La pénalisation de la consommation et la prévention par l’abstinence totale évitent souvent aux parents tout dialogue sur les drogues et surtout, d’établir clairement la gestion des comportements addictifs au sein de la famille et en société. Cela les dispense de raconter leurs frasques passées et de faire des concessions sur leurs pratiques futures. Il suffirait pourtant d’avoir un discours informé et pragmatique à base de RdR et de bon sens pour établir la confiance entre les générations sur ce sujet trop souvent tabou ou biaisé.

L’échec de la prévention primaire

Dans son texte « Que dire aux enfants ? », issu du Pot Book de Julie Holland et traduit sur le site cannabistext.org, Marsha Rosenbaum propose d’abord une analyse de l’échec de la prévention conventionnelle dont l’efficacité a été compromise par :

  • « le refus de distinguer usage de drogues et abus en affirmant que  » tout usage est abus  » » ;
  • « le recours à la désinformation pour faire peur » ;
  • et « l’incapacité à fournir des informations complètes qui aideraient les usagers à réduire les dommages pouvant résulter de leur consommation ».

Une stratégie fondée sur la peur et la désinformation ne peut pas fonctionner à long terme, encore moins à l’ère d’Internet et de l’information largement vérifiée et propagée à une échelle globalisée. Et si Marsha Rosenbaum focalise son propos sur le cannabis, sa méthodologie peut très bien s’appliquer à d’autres substances. La Drug Policy Alliance (DPA) a adapté ce texte comme modèle global de prévention « Safety First » (la sécurité d’abord).

Information vs désinformation

Pour apaiser la peur, le document rappelle que : « La quasi-totalité des études ont pourtant montré que la grande majorité des étudiants qui essayent les drogues licites et/ou illicites ne deviennent pas toxicomanes (US GAO, 1993 ; Duncan, 1991). Nous devons parler de l’alcool et des autres drogues de manière élaborée et distinguer usage et abus. Sinon, nous perdrons notre crédibilité. »

Marsha Rosenbaum répond aux questions récurrentes que les parents posent sur la marijuana lors des ateliers qu’elle anime dans le cadre de son travail de sociologue médicale :

  • Est-elle vraiment beaucoup plus puissante et dangereuse aujourd’hui que par le passé ?
  • Est-elle vraiment aujourd’hui plus addictive que jamais ?
  • Pousse-t-elle vraiment les usagers à se tourner vers des drogues plus « dures » ?
  • Fumer de la marijuana provoque-t-il vraiment le cancer du poumon ?

Elle conseille d’abord deux livres, auquel j’ajoute les chapitres du Pot Book traduits sur cannabistext.org, Marijuana, mythes et réalités (1997) et Marijuana: A New Look at the Scientific Evidence (2005). « Chacun montre que les affirmations concernant les risques de la marijuana ont été exagérées, voire dans certains cas fabriquées (Zimmer et Morgan, 1997 ; Earleywine, 2005). » Puis elle consacre un paragraphe à chaque réponse.

La sécurité d’abord

À la place du « Just Say No », elle propose le concept « Safety First ». Une approche basée sur la réalité permet aux adolescents de prendre des décisions responsables en :

  • « donnant une information honnête, basée sur la science » ;
  • « encourageant la modération si l’expérimentation persiste » ;
  • « favorisant la compréhension des conséquences juridiques et sociales de l’usage de drogues » ;
  • « faisant de la sécurité une priorité grâce à la responsabilisation personnelle et à la connaissance ».

Elle insiste sur l’information fondée sur des données scientifiques fiables, sur la répartition de l’information sur les drogues dans la plupart des matières enseignées, sur l’apprentissage de la modération et l’évaluation réelle du risque de prison et de stigmatisation sociale.

Que faire concrètement ?

Marsha propose aux parents un programme en 5 étapes : écouter, apprendre, agir, guider, aider. « Une relation ouverte, basée sur la confiance, avec un parent ou un adulte respecté est en réalité le meilleur moyen de dissuader les tendances à l’abus. » Cela ne veut pas dire encourager ou autoriser l’usage de drogues mais être présent au côté des enfants pour en comprendre les enjeux et en assumer les conséquences avec leur sécurité comme première préoccupation.

Les professionnels de la RdR et les décideurs français seraient bien inspirés d’adopter ce modèle.

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