Marche Mondiale & Appel du 18 joint : la longue marche

L’idée d’une manifestation internationale pour la légalisation est attribuée à Dana Beal, suite à la session extraordinaire de l’Onu sur les drogues réunissant en 1998 à New York une flopée de chefs d’États, dont Jacques Chirac qui se lança dans un discours aussi musclé que creux : « L’histoire devra retenir que c’est d’ici, à New York, qu’est partie la grande croisade des Nations contre la drogue, une croisade qui ne devra plus cesser tant que nous n’en aurons pas fini avec ce cancer qui ronge nos sociétés. »

Dana Beal

Dana Beal est un militant politique américain, qui a créé le Youth International Party (YIP) avec Jerry Rubin et Abbie Hoffman. Son combat pour réformer la loi sur les stupéfiants et les libertés civiles ne date pas d’hier. Il a fondé l’association Cures No War, qui milite pour l’accès au cannabis thérapeutique, et a beaucoup œuvré en faveur de l’ibogaïne comme traitement pour décrocher des opiacés. En 2011, Dana Beal a été condamné dans le Wisconsin à onze mois de prison pour détention de marijuana.

C’est lors de cette session new-yorkaise que l’Onu se donna dix ans pour éradiquer les drogues de la planète terre, un projet aussi irréaliste qu’utopique contre lequel s’élevèrent un grand nombre d’ONG et d’associations. Ce sont sans doute ces déclarations guerrières et fantaisistes contre le cannabis qui poussèrent Dana Beal (lire l’encadré) à organiser avec d‘autres organisations internationales une journée mondiale de mobilisation afin que cesse la stigmatisation du cannabis et de ses usagers.

Avant de s’exporter sur tout le continent américain, de Toronto à Buenos Aires, les premières manifestations de la Million Marijuana March aussi appelée Global Marijuana March eurent lieu en 1999 dans plusieurs villes des États-Unis. Mais aussi à Londres… où je me suis rendu à l’époque avec Farid Ghehiouèche dans le cadre de la campagne des élections européennes, si mes souvenirs sont exacts.

Des débuts difficiles

Selon le pays et la situation locale, la nomination change. En France, c’est Farid, le représentant à travers Encod (The European Coalition for Just and Effective Drug Policies) de la cause cannabique à l’international, qui a lancé l’idée et organisé en 2001 une première manifestation, sous le nom de « Marche mondiale du cannabis » (MMC). Les débuts ont été difficiles. En 2002, à la veille du deuxième tour de l’élection présidentielle où toute manifestation politique était interdite, celles et ceux qui ont répondu à l’appel de Farid ont affronté les CRS et ont été contraints de battre en retraite.

Longtemps reléguée sur le terre-plein du boulevard Richard Lenoir par la préfecture de police, longtemps dédaignée par les associations de réduction des risques, la manifestation était soutenue par les Verts et du bout des lèvres par le Circ, suite à un texte imprudemment publié sur le site de la Marche par une militante aigrie accusant en termes très peu courtois l’association de vouloir récupérer l’événement alors que nous voulions seulement donner un coup de main à Farid. Cet épisode malheureux a freiné les ardeurs des militants du Circ durant de longues années, mais Farid Ghehiouèche n’a pas capitulé. Et, d’une année sur l’autre, a organisé avec plus ou moins de succès la Marche mondiale du cannabis.

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La marche triomphante

Mais tout change pour le dixième anniversaire de la Marche, en 2011. Les associations de réduction des risques, Asud en tête, mais aussi Aides, l’Afr, Act Up, Techno + et bien sûr le Circ montent au créneau… Nous imprimons un flyer. Au recto : « Dépénalisation, Autoproduction, Cannabis thérapeutique – une autre politique des drogues est possible ». Et au verso, une déclinaison de nos propositions en sept points.

Vous vous souvenez peut-être, chers lecteurs, de la quatrième de couverture du numéro 46 du journal. Il s’agissait d’un texte sur la sécurité – un thème cher aux prohibitionnistes – démontrant de façon implacable que la légalisation milite pour la sécurité des usagers et des territoires, de la société et des familles, en lançant un appel à participer à la Marche mondiale. Nos efforts communs ont payé et pour la première fois, la Marche méritait son nom puisque nous avons défilé dans la bonne humeur de Bastille à Stalingrad.

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Marche mondiale cannabis paris 9 mai 2015

L’édition 2015 de la Marche mondiale parisienne a, semble-t-il, trouvé son public : des jeunes mais pas que, qui ont marché en musique et en grand nombre (1 500 personnes, je dirais) de Bastille à République avec, en vedette américaine, une intervention d’Esther Benbassa, la sénatrice qui a proposé à ses collègues de légaliser le cannabis. Les médias, beaucoup plus nombreux que les années précédentes, n’ont pas boudé leur plaisir, signe que si le débat n’est pas à l’ordre du jour au Parlement, il l’est dans la société. Preuve que le cannabis est intégré dans nos mœurs : l’entrée du mot beuh dans le Petit Robert.

Appel du 18 joint

De Figeac à Tahiti, de Lyon à Poitiers, en passant par Marseille et Paris, le Circ organisait cette année encore l’Appel du 18 joint.

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Si Paris n’a pas le monopole de la Marche mondiale du cannabis, les événements organisés en régions, à l’exception de Lyon et Marseille, n’ont pas rencontré le succès escompté. À ce rythme, en 2016, où une session extraordinaire de l’Onu sur la politique des drogues est prévue, et en 2017, année de l’élection présidentielle, nous serons des dizaines de milliers à descendre dans la rue pour défendre la légalisation du cannabis.

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