Touchées par le VHC, ils témoignent sur leur parcours

Face à l’extension de l’hépatite C (VHC) qui frappe tout particulièrement les usagers et les ex-usagers de drogues, ASUD s’est engagé depuis plusieurs années à lutter contre cette maladie à travers différentes actions visant à encourager le dépistage, l’accès aux traitements et le soin. L’arrivée de nouvelles générations de molécules, les Antiviraux à Action directe (AAD), qui ont déjà démontré leur très grande efficacité avec peu d’effets secondaires, permettent de pouvoir espérer à terme l’éradication de cette maladie. ASUD en partenariat avec le laboratoire ABBVIE a donc réalisé une série d’interviews avec trois personnes aux situations personnelles bien différentes, ayant été touchées par le VHC et qui témoignent sur leur parcours, leurs réactions face à la découverte de leur infection, les raisons qui les ont poussés à suivre un traitement et pour finir, nous faire part de ce que ce dernier a supposé pour eux.

Salut les Drogués

Salut les drogués, on se retrouve pour un petit débunkage. On s’est matté une petite émission d’RMCtv où il y avait des affirmations pseudo scientifiques, on s’est dit qu’on allait revenir dessus, que ça pourrait être sympa. Ça a l’air nécessaire de faire une petite mise au point!

Projection-test du nouveau film d’ASUD La RdR en France 2ème Partie

La réduction des risques liés aux usages de drogues (RdR) est apparue dans les années 80 afin de limiter les ravages de l’épidémie de SIDA chez les usagers par voie intraveineuse, principalement d’héroïne. Malgré la pénalisation de la consommation instaurée en 1970, l’usage de drogues par injection s’est considérablement développé au cours des années, d’une poignée d’expérimentateurs à des centaines de milliers d’usagers réguliers début des années 90, au pic des contaminations par le VIH et de la mortalité par overdose.

Des associations de lutte contre le SIDA, des représentants des usagers de drogues, des médecins et des membres de la société civile ont lutté pour imposer la RdR : matériel stérile pour la consommation, accueil des usagers, informations spécifiques sur les usages, traitements de substitution aux opiacés, centres de soins, prévention en milieu festif. Une réussite en matière de politique de santé publique aujourd’hui mondialement reconnue.

ASUD est une association d’usagers et d’ex-usagers de drogues impliquées dans la RdR depuis 20 ans. Dans son premier film, La RdR en France 1ère Partie L’Histoire, ASUD a voulu raconter l’histoire de ce combat méconnu du grand public et même de nombreux intervenants en RdR.

Dans ce second volet, les réalisateurs Philippe Lachambre et Laurent Appel, s’attachent à présenter un état des lieux des dispositifs actuels de RdR depuis l’inclusion en 2002 des établissements « expérimentaux » de prise en charge dédiés dans le système médico-social (CAARUD, CSAPA, etc.) et l’inscription de la politique de RdR dans le code de santé publique en 2004-05. Ce bilan est dépeint grâce aux témoignages de professionnels, d’usagers de ces structures et des membres d’ASUD. A travers ces regards croisés, c’est aussi un constat des réussites, des limites et des améliorations nécessaires de ces dispositifs qui est proposé, avec comme fil conducteur le point de vu des premières personnes concernées, les usagers et ex-usagers de drogues.

Mercredi 2 décembre
18h-22h à la Trockette
125 rue du Chemin Vert 75011 Paris
(Métro Père Lachaise)

24h Chrono de la vie d’un tox au boulot

Pas facile d’être accro et de n’éveiller aucun soupçon à ce sujet sur son lieu de travail. Surtout quand on s’appelle Jack Bauer et que le boulot consiste tous les ans pendant une journée à sauver le monde de la menace terroriste. La drogue au travail est l’une des intrigues secondaire de la saison 3 de la série 24 Heures Chrono.

Après un an passé à avoir infiltré un cartel de narcos mexicain, Jack Bauer a mis leur chef sous des verrous made in USA. L’infiltration de Jack est finie, il va retourner au bureau avec ses collègues. Seul hic, il est entretemps devenu accro à l’héro. L’occasion pour la morale américaine de nous montrer à grands coups de clichés le combat d’un (sur)homme contre son addiction. Il est 13h.

13h20
Jack montre des signes de manque, son coéquipier s’en rend compte. Lourds regards accusateurs et compassionnels à la fois.

13h26
Jack fait une crise de manque seul dans son bureau.

13h50
Son coéquipier lui annonce qu’il sait. Il ne dira rien à la hiérarchie mais désapprouve sa faiblesse.

13h51
Jack se prépare un shoot au bureau.

13h54
Sa fille l’appelle. Elle ne sait rien. Jack pense à elle, se sent coupable et renonce à son shoot.

14h01
Jack jette sa seringue pleine dans la corbeille à papier.

14h05
Son coéquipier lui propose d’essayer la méthadone plutôt que de shooter au bureau.

14h38
Pour son enquête, Jack fait une descente dans un squat de tox et tombe sur un injecteur. Jack marque une pause. Est-il dégouté ou aimerait-il être à sa place ?

15h00
Nouvelle crise de manque pour Jack qui attend quelqu’un dans sa voiture. Il décide de se shooter mais son rencard arrive juste avant qu’il n’ait pu s’injecter. Il planque son matos mais sa préparation glisse côté passager.

15h23
Jack vomit et ce n’est pas le mal de mer !

asud55 p32 24H Chrono15h40
Une docteure liée à l’enquête monte dans sa voiture et voit sa préparation. Elle comprend qu’il est en manque et le questionne. Jack avoue sa dépendance. Soulagement de pouvoir le dire à quelqu’un qui ne le juge pas.

16h40
Son coéquipier refuse d’exécuter un ordre au prétexte que c’est un camé. Il le prévient qu’il ne le couvrira plus à ce sujet.

17h43
Une collègue de Jack trouve la seringue qu’il a jetée à la poubelle. Elle fait analyser le contenu. C’est bien de LA Drogue. Toute l’équipe perd confiance en Jack et décide de dire à sa fille que son père est un drogué.

18h42
Jack est à nouveau en manque alors qu’il est prisonnier du cartel qu’il avait infiltré. On lui fait remarquer qu’il n’était pas obligé de se shooter pour s’intégrer parmi eux. S’il l’a fait, c’est pour soulager son mal-être.

19h25
Jack se réveille en manque dans un avion après avoir été assommé, ce qui ne l’empêche pas de tuer son gardien rien qu’avec les jambes.

20h15
Jack est en manque dans la villa du cartel.

21h10
Le chef du cartel propose à Jack de la méthadone. Il la prend pour enfin calmer son manque (les scénaristes ont dû se lasser des crises de manque qui ralentissaient l’histoire).

02h07
Jack revient au bureau. Tout le monde est au courant de sa dépendance. Son boss lui demande de se faire soigner sinon ils ne travailleront plus avec lui. Il accepte sur le champ et l’annonce à sa fille avant de se rendre à l’infirmerie pour une prise de sang.

02h30
Jack est envoyé chez un psy à qui il raconte son parcours dans la drogue. Il affirme s’être drogué pour des raisons uniquement professionnelles pour les besoins de l’infiltration. Ses supérieurs en doutent et pensent qu’il y a aussi pris du plaisir. Si c’est le cas, c’est une faute qui peut lui faire perdre sa place.

11h15
Jack explique à son boss qu’il s’est drogué par devoir patriotique et comme il vient de sauver le monde une nouvelle fois, on ne lui annonce pas tout de suite qu’il est viré pour s’être drogué. Il l’apprendra au début de la saison 4.

Bravo Jack, comme beaucoup d’entre nous, tu as dû te cacher, risquer ton job, galérer pour trouver une dose ou un coin tranquille pour shooter. Mais surtout, tu as senti le regard de tes proches, famille et collègues, changer sur toi pour la seule et unique raison que tu avais besoin de remplir ton corps de quelques molécules légalement prohibées et moralement répudiées. Mais en huit heures à peine dans la peau d’un tox, tu as trouvé le meilleur moyen, bien connu par chez nous quand l’ardeur militante n’est pas là, de contourner ces désagréments : le profil bas, le mensonge, le pipotage… Bref, tu leur as servi le discours que la société veut entendre pour qu’on nous fiche la paix. Mais y croyais-tu Jack ?

Laurent Appel d’ASUD fait le buzz à Expogrow

Exprogrow, c’est l’évènement social, culturel et commercial sur le cannabis. Ça se passe chaque année à Irun au Pays-Basque espagnol. Laurent Appel, militant d’ASUD et journaliste, y était présent du 12 au 14 septembre et à cette occasion il a été interviewé par Expogrow et Sud Ouest.

Extrait de l’interview de Laurent Appel dans Sud Ouest (13 septembre 2014)

Laurent Appel 2014« La prohibition n’a pas démontré qu’elle protégeait le consommateur, ni pour sa santé, ni pour sa sécurité, ni pour la sécurité publique. En disant « ne consommez pas », on ne donne pas les bons réflexes aux gens quand ils consomment. Si on veut créer une éducation autour du cannabis, on ne peut plus rester dans la prohibition dure. » (cliquez pour lire l’interview complète)

Interview Expogrow (13 septembre 2014)

Drugo : le conte de fée de la guerre aux drogues

En attendant encore quelques semaines le prochain ASUD Journal consacré aux enfants, voici le conte de fée en film d’animation de la Global Commission on Drug Policy : la terrible histoire de Drugo, un dragon banni du royaume par le Roi qui mettait au donjon tous ceux qui continuaient à lui rendre visite. La guerre entre Drugo et les soldats du Roi ravagea le royaume et l’appauvrit lorsqu’un jour les anciens Rois revinrent avec une idée…

Drogue, la fin de la prohibition (Reportage)

Pour illustrer l’échec des politiques répressives en matière de drogues, des journalistes suisse ont pris l’exemple de la France. ASUD et Gaïa Paris y sont allés de leurs témoignages et analyses. Dans les pays voisins ce sont les initiatives progressistes qui sont données en exemple.

Le 20ème siècle a connu 3 colossales abominations : le communisme, le fascisme, et le Guerre contre la Drogue. Après plus de 40 ans, le bilan de cette guerre est effroyable. Nous savons aujourd’hui que les politiques prohibitionnistes et la répression qui les accompagne ont eu des coûts (humains, financiers, sanitaires, sécuritaires, politiques, environnementaux) incommensurablement plus élevés et dévastateurs que les drogues elles-mêmes. Si vous voulez mieux comprendre pourquoi et comment mettre progressivement fin à cette prohibition regardez ce reportage réalisé par Sabine Kennel et Philippe Mach pour l’émission suisse Temps Présent sur RTS diffusée le 24 avril 2014.

L’intervention d’ASUD et Gaïa Paris sur la France se trouve à partir de la 33ème minute.

En 1997, cette émission avait réalisé un reportage sur le même sujet intitulé : Drogue: l’échec de la répression :

Ciné-Débat : L’Histoire de la Réduction des Risques

Dans les années 80 une guerre victorieuse a été menée dans l’indifférence générale. Cette guerre c’est celle menée par la politique de réduction des risques contre le virus du sida qui décimait une catégorie de population très stigmatisée : les injecteurs d’héroïne.

Aujourd’hui cette histoire appartient au passé au point que l’on oublie la virulence des débats qui opposaient partisans et adversaires de la méthadone et du subutex. Une histoire qui est aussi celle d’une société tétanisée par les mots de toxicomanie, d’homosexualité et d’immigration et là on est toujours dans l’actualité. Si la substitution ou la fourniture de seringue stériles appartiennent aujourd’hui à la panoplie classique de l’intervention en addictologie il n’en est pas de même des salles de consommation à moindres risques et les débats récents qui ont accompagné la loi Taubira sur le Mariage pour Tous, montrent que l’épidémie de sida a découvert des plaies toujours à vif dans la société française.

La Petite Boutique des Horreurs du Comptoir Général et l’Association Française pour la Réduction des risques liés aux usages de drogues vous propose, après la projection du documentaire « La réduction des risques en France – Partie 1 l’Histoire » de débattre avec des représentants des usagers de drogues, des médecins et des acteurs de la société civile, qui se sont battu pour imposer la politique de « Réduction des Risques » liée aux usages des drogues.

18h30 : La Réduction des Risques en France – 1ère partie l’Histoire (58’)

Film de Laurent APPEL et Philippe LACHAMBRE, sur une idée originale de Fabrice OLIVET et Laurent APPEL, poduit par ASUD.
ASUD est une association d’usagers ou d’ex-usagers de drogues, impliqués dans la Réduction des risques depuis 20 ans. Nous avons voulu raconter l’histoire de ce combat méconnu du grand public, porté par des militants, dont certains sont aujourd’hui disparus.

19h30  : Débat sur l’histoire de la Réduction des Risques

  • Daniel DEFERT, fondateur de l’association AIDES
  • Fabrice OLIVET, de l’association ASUD
  • Bertrand LEBEAU, Médecin généraliste

 

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(7€ de participation aux frais)

Serial Dealers

A l’occasion de la diffusion du final de la série Breaking bad en France le 4 janvier dernier (sur OCS), ASUD vous propose avec ce dossier Serial Dealers de revenir sur nos séries préférées en matière de trafic de stupéfiant : Weeds et Breaking bad.

Serial dealers : Weeds (saisons 1 à 6) vs Breaking bad (saisons 1 à 3)

Weeds vs breaking bad
On a beau militer pour la légalisation des drogues, il faut bien reconnaître que sans leur prohibition, de nombreuses créations culturelles ou divertissements – tous domaines confondus – avec lesquels nous nous délectons n’auraient jamais vu le jour.

Weeds saison 7 vs Breaking Bad saison 4

Weeds 7 vs Breaking bad 4
Hasard du calendrier ? Concurrence entre chaînes ? Stratégie de consolidation réciproque de l’audience ? Cette année, les deux séries américaines suivies de près par Asud-Journal depuis le numéro 44 ont été […]

Weeds saison 8 finale

Weeds cible
La chaîne de télé américaine Showtime a allumé son splif en 2005. Carton immédiat. Weeds, avec sa mère de famille dealeuse de beuh, est devenue le fer de lance de la chaîne. […]

Breaking Bad Saison 5, 1ère partie

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Walter a gagné. Il s’est débarrassé de son patron, Gus Fring, l’ennemi juré de la saison 4. Que va-t-il faire maintenant qu’il est libre ? Arrêter la production de méthamphétamines et reprendre […]

Breaking Bad, le final

Breaking-bad
Qu’il doit être difficile de choisir l’issue finale d’une série dont le personnage principal est un antihéros immoral. Quelle valeur faire triompher ? Le bien ou le mal ? Punition ou rédemption […]

Breaking Bad, le final

Qu’il doit être difficile de choisir l’issue finale d’une série dont le personnage principal est un antihéros immoral. Quelle valeur faire triompher ? Le bien ou le mal ? Punition ou rédemption ? La conclusion de Breaking bad est-elle aussi bien que celle de Weeds, l’autre série stupéfiante suivie par ASUD ?

A ce jeu d’équilibriste les séries Dexter (le gentil serial Killer) et Dr House (le méchant médecin génial) ont pondu des épisodes finaux mi-figue mi-raisin pour contenter tout le monde : la morale (rédemption pour tous), les fans (les héros ne meurent pas) et le bizness (on pourra faire une suite). C’est à peu près ainsi que se terminait la 1ère partie de la 5ème et dernière saison de Breaking bad en juillet 2012. Ce pseudo happy end ne collant pas avec le titre de la série, les choses se devaient de mal tourner dans les 8 ultimes épisodes diffusés plus d’un an plus tard en août 2013.

Serial-Dealers

Cet article fait partie du dossier Serial Dealers.

Previously on Breaking Bad

Les vrais Walter White derrière les barreaux

C’est un nom prédestiné ! Aux Etats-Unis au moins 2 homonymes ont déjà été condamnés en Alabama et dans le Montana pour fabrication et trafic de méthamphétamine.

Walter White est un homme au milieu du gué. Cet américain de la middle class dans le middle age, prof de chimie de 50 ans, apprend qu’il est atteint d’un cancer du poumon et qu’il lui reste 3 mois à vivre. Pour payer ses exorbitants frais médicaux, il va tenter de gagner rapidement beaucoup d’argent en utilisant ses compétences de chimie pour fabriquer de la méthamphétamine. Pour entrer dans ce milieu inconnu, il s’associe avec Jesse, un ancien élève consommateur de meth et dealer. Tous deux, au fil des saisons gravissent en quelque mois, l’échelle du trafic de stupéfiants local puis international grâce à l’exceptionnelle pureté du produit et l’écrasante intelligence de Walter. Cette réussite va faire de Walter un riche et puissant parrain du milieu, sous le nom d’emprunt Heisenberg,  auquel rien ne résiste pas même le cancer. Le prix de cette ascension est une descente aux enfers, morale et psychologique. Les personnages doivent repousser sans cesse leurs limites pour ne pas y laisser leur peau : mensonge, manipulation, trahison, violence, chantage, corruption, mort… deviennent nécessaires pour évoluer dans ce milieu hostile, clandestin et criminel. L’humour n’est pourtant pas oubliée dans cette série à la réalisation de qualité. La saison 5 est d’ailleurs entrée au Guinness Book pour avoir obtenue la meilleure note critique (99%) sur le site Metacritic.com.

Échapper à la police est l’un des principaux enjeux de la série. Il s’incarne dans la relation entre Walter et son beau-frère Hank qui est un enquêteur de la DEA (les stups américains). Hank gravit lui aussi les échelons et devient directeur par son excellent travail sans savoir qu’il est manipulé par Walter qui s’en sert pour éliminer sa concurrence. Au milieu de la 5ème saison lors d’un diner familial chez Walter, plusieurs mois après que celui-ci se soit définitivement retiré des affaires, Hank découvre une preuve que Walter et Heisenberg sont la même personne.

Quant au fragile Jesse, il est rongé par les morts que lui et Walter ont causé au cours de leur aventure notamment celle d’un enfant, témoin innocent abattu de sang froid. Il décide de renoncer à l’argent acquis par le sang et nourrit une haine grandissante envers Walter.

Breaking Bad (Season 5)

Drogue, l’autre cancer

La fin de la série met en scène l’affrontement de Walter contre Hank et Jesse, personnages pour qui il a une vraie affection et qu’il a tenté de protéger à plusieurs reprises. Tous deux veulent lui faire payer le mal qu’il a causé autour de lui. Walter doit aussi s’affronter lui-même puisque le cancer est revenu. Cancer que Walter n’a jamais cessé d’avoir en réalité et qui était passé du stade biologique au stade psychologique. L’égocentrisme et la mégalomanie durant sa période Heisenberg avaient dévoré sa personnalité.

L’image du cancer qui se multiplie jusqu’à une issue fatale est finalement au centre de la série de son ouverture à son dénouement. Le remake mexicain s’appelle d’ailleurs « Metastasis« . Au delà de la maladie, il y a bien sûr le cancer de l’argent que Walter accumule jusqu’à ne plus savoir combien il possède. Il va de paire avec celui du pouvoir qui ne s’arrêtera que lorsque Walter aura atteint le sommet, seul, sans amis ni famille. Ces deux quêtes, argent et pouvoir, vont engendrer deux autres cancers. Côté pile, la violence appelle la violence et ce qui était de la légitime défense au début de la série va devenir l’élimination systématique de tous ceux qui se mettent en travers de la route de Walter. L’apogée sera l’organisation d’un nonuple homicide simultané dans différentes prisons pour protéger son identité. Côté face, le secret mène aux mensonges, en premier lieu à sa femme puis avec elle, ils ne cessent de grossir. Leur place est telle que Walter devient paranoïaque et n’arrive plus à faire confiance à qui que se soit. La dissimulation de la vérité devient vite une préoccupation aussi vitale que le besoin d’argent, elle le supplante même durant la dernière saison.

Prohibition, l’autre chimio

Pour vaincre le cancer Walter doit d’abord se battre contre son traitement : une chimiothérapie qui affaiblit son organisme et un endettement causé par ses frais médicaux. Difficile de ne pas y voir une analogie avec « la guerre à la drogue », cette politique sécuritaire qui affaiblit la société en s’attaquant plus aux drogués qu’aux produits tout en favorisant les réseaux criminels. Et dont le coût est de plusieurs dizaines de milliards d’euros depuis plus de 40 ans. Le cancer a aussi la particularité que l’on parle rarement de guérison mais plutôt de rémission plus ou moins complète à cause du risque de récidive toujours présent. Un traitement lourd et coûteux, aux résultats plus qu’imparfaits, qui détruit des cellules saines, si la Drogue est un cancer (c’était le titre d’un rapport sénatorial en 2003) alors la Prohibition est une chimiothérapie que l’on continuerait coûte que coûte.

Malheureusement pour Walter, il n’existe pas d’alternative politique à court terme qui pourrait le sauver. Contrairement à la fin de la série Weeds qui anticipait en 2012 avec un an d’avance la légalisation de l’usage récréatif de cannabis, la méthamphétamine n’est pas près d’être légalisée. Cela ne pouvait que finir bad pour Walter et Hank. Trafiquants et policiers, la chair à canon de cette guerre, n’ont d’existence que par la prohibition qui ironiquement les rend interdépendants.

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La vraie fin de la série…

Bryan Cranston n’est pas seulement le meilleur acteur (et c’est Anthony Hopkins qui le dit) pour son rôle dans la série Breaking Bad. Il officiait avant dans la série comique Malcom en tant que Hal, le père (cette fois-ci) immature d’un enfant (cette fois-ci) surdoué. A l’occasion de la fin de Breaking Bad, il reprend le rôle de Hal dans une scène en clin d’œil à son autre série. C’est bon tout le monde à suivi ?

Les seuls à s’en sortir malgré tous les dommages collatéraux qu’ils subissent sont les civils ainsi que Jesse, le consommateur de la série. Le message est clair, il y aura toujours des gens qui auront envie de se droguer, même après l’extinction du dernier prohibitionniste et du dernier dealer. Comme si son appétit pour la drogue, qui n’engage que lui, l’avait protégé de la soif d’argent et de pouvoir qui détruisent les autres personnages. Lui seul garde une sensibilité humaniste tout au long de la série, là où les autres personnages se comportent en machines rationnellement conformistes selon le camp dans lequel elles opèrent. Et si la drogue était le dernier refuge de ceux qui n’acceptent pas le cynisme du ce système et qui préfère le voir s’effondrer pour repartir à zéro.

Série de Vince Gilligan, 5 Saisons, 2008-2013. Disponible en DVD, Blu-Ray et VOD.

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Cet article partie du dossier Serial Dealers.

L’enfant radieux

« J’avais du fric, mes toiles n’avaient jamais été aussi bonnes. Je vivais en reclus, travaillant beaucoup, me défonçant beaucoup. J’ai été odieux ».

Basquiat in The New York Times

The Radiant Child
Date de sortie : 13 octobre 2010 (1h28min)
Réalisé par Tamra Davis
Avec Julian Schnabel, Larry Gagosian, Bruno Bischofberger…
Genre : Documentaire
Nationalité : Américain

Habilement construit autour d’entretiens filmés trois ans avant sa mort (par overdose), ainsi que d’interviews plus contemporains, le film retrace la vie météorique et l’œuvre imposante de l’artiste américano-haïtien. Le documentaire est honnête, sincère et bien ficelé. À voir, donc.

Habitant Manhattan de 1976 à 1986, et plus précisément dans le Lower East Side, j’ai souvent croisé, puis sympathisé avec Basquiat. On s’est perdus de vue quand il se mit à fréquenter de moins en moins de zonards, et de plus en plus de « Glitterati1 ».

L’évocation — dans le dernier quart du film — du rôle non négligeable de l’héroïne dans le parcours de Basquiat, m’a intrigué. Remettons-nous un instant dans le contexte de la fin des années 1970, à New York. La ville est officiellement en faillite, le président Ford refuse toute aide financière fédérale et tous les services sociaux subissent une brutale cure d’austérité.

Bien sûr la tension monte, et en 1977, une banale panne de courant sur l’île de Manhattan déclenche l’explosion : 3 jours d’émeutes et de pillage généralisés dans les cinq « Boroughs2 ».
CQFD, le peu de flics encore en poste étaient en grève.

Bushwick
« Noël en juillet » à Bushwick en 1977

C’était l’agonie du « Welfare State », et l’interlude avant l’arrivée de Ronald Reagan et des Neo Cons (ervatives) au pouvoir. Dans les ghettos, et de longue date, la pratique de l’« endiguement » était en vigueur. C’est-à-dire qu’une tolérance limitée du trafic de dope existait.

Mais seulement dans les ghettos, et principalement destinée à une clientèle noire et latino. La série The Wire décrit parfaitement l’ambiance qui régnait à cette époque, dans les rues du Lower East Side. La « guerre contre la drogue » comme méthode de contrôle social, en gros. Inutile de préciser que la schnouf était omniprésente, et disponible à tout moment. De longues files d’attente se formaient, en pleine rue et en plein jour, devant les immeubles abandonnés, squattés par les revendeurs. J’avais l’impression que l’autorité de l’État se vaporisait (OK, je l’avoue. Je ne faisais pas trop de différence entre désirs et réalités). Que New York City, ou du moins le L.E.S.3, était devenue une espèce de Zone autonome temporaire. En plus, des décennies de propagande antisoviétique diffusée par le complexe militaro-industriel avaient fini par nous convaincre de l’inéluctabilité d’un holocauste thermonucléaire. A court, ou moyen terme.

« Live fast, die young… » n’était pas juste une « pose » pour ados en manque de punkitude, mais un constat lucide sur la situation que nous vivions. C’est à cette époque que je remarquais d’étranges aphorismes subversifs, bombés sur les murs de la ville, et signés SAMO©.

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Samo©… comme une fin du salariat « j’ai fait des études » « pas ce soir chéri(e) »… Bluz… Réfléchis…

Un de leurs auteurs était Jean-Michel Basquiat. Rencontré au cours de mes propres campagnes d’affichage nocturne, on a sympathisé et il passait irrégulièrement me voir dans le taudis que j’occupais, sur le Bowery. Un gars taiseux. Douloureusement timide. Je ramais comme un damné pour lui arracher quelques mots, au cours de nos simulacres de conversation. Passent quelques mois, et chacun de notre côté, en plus de nos activités de « plasticiens de rue », nous fondons des groupes musicaux. Le sien se nomme « Gray ». Et il ne « savait » pas plus jouer de la clarinette, que moi de la basse… Un avantage, nous semblait-il. La virtuosité est chiante. Ce qui compte, c’est l’intention. Que ça soit en musique, ou en peinture d’ailleurs…

Rock-star/peintre

Mais ce qui m’intrigua chez Jean-Michel fut sa soudaine métamorphose. Plus la moindre trace de timidité. Le gars était devenu disert, plein d’humour, très sûr de lui, et de ce qu’il avait à faire. Comme si tout ce qui était refoulé en lui se libérait subitement. Il développa une force de travail démente, et un sens de l’autopromotion redoutable. Pour rester éveillé et concentré sur une tâche, deux à trois jours d’affilés, me dis-je, c’est qu’il doit être dans cette phase « ascensionnelle » de sa rencontre avec le smack4. Un proche de Warhol rédigea un article élogieux sur son travail dans Art Forum. D’autres journaux suivirent. Il exposa au Times Square Show. Fit la connaissance de Warhol au culot, dans un resto, où il déjeunait avec un galériste.

À partir de là, sa renommée en fit une rock-star/peintre. Il changea d’amis. Naviguait au jugé parmi les « Beautiful People » et devint riche. Sous la pression constante des galeries pour produire toujours davantage, il se défonçait allègrement. Probable qu’à ce stade de son addiction, l’heroïne lui ne lui procurait plus cette « lucidité créative » des premiers jours.

Après une cure de sevrage (la deuxième), de retour chez lui, il s’administra une surdose.

Une fin tristement banale. Ceux qui y échappèrent croisèrent aussi la faucheuse du HIV. [Keith Haring, dont le « succès » critique et commercial était plus patent, y succombera un an et demi plus tard]. Était-ce intentionnel ? Sûr que sa désillusion concernant sa vie, et ce qu’elle était devenue devait être cuisante. La mort de son mentor, Warhol, la chute de sa productivité et de sa cote sur le marché de l’art n’ont sans doute rien arrangé.

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Reste aujourd’hui environ un millier d’œuvres qui ne sont pas QUE des marchandises5.

Et elles nous donnent encore de précieux indices, pour sortir de ce dédale où nous nous consumons.

 Notes

1 – Jeu de mots sur Litterati, l’élite intello, et Glitterati, l’élite paillettes. Aujourd’hui, on dirait bling-bling.
2 – The Bronx, Brooklyn, Manhattan, Queens, & Staten Island.
3 – The Lower East Side.
4 – Héro.
5 – En 2007, la vente aux enchères de ses œuvres totalisa plus de 115 000 000 $.

DVD : La RdR en France 1ère partie l’histoire

portraitDVD

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à l’ordre d’ASUD à
ASUD
32 rue Vitruve
75020 PARIS

Un film de Laurent Appel et Philippe Lachambre produit par ASUD

Nous avons voulu raconter l’histoire d’un combat, celui pour la mise en place de la politique de Réduction des risques liés aux usages de drogues (RdR). Ce film retrace ce combat méconnu du grand public et même de nombreux intervenants de RdR arrivés après l’institutionnalisation du dispositif en 2004-2005 au travers les images d’archives et les témoignages de ceux qui l’ont vécu.

Durée : 58 minutes

Résumé

La réduction des risques liés aux usages de drogues (RdR) est apparue dans les années 80 afin de limiter les ravages de l’épidémie de SIDA chez les usagers par voie intraveineuse, principalement d’héroïne. Malgré la pénalisation de la consommation instaurée en 1970, l’usage de drogues par injection s’est considérablement développé au cours des années, d’une poignée d’expérimentateurs à des centaines de milliers d’usagers réguliers début des années 90, au pic de contamination par le VIH et de la mortalité par overdose.

Des associations de lutte contre le SIDA, des représentants des usagers de drogues, des médecins et des membres de la société civile ont lutté contre de nombreuses résistances, y compris la majorité du corps médical, pour imposer la RdR : matériel stérile pour la consommation, accueil des usagers, informations spécifiques sur les usages, traitements de substitution aux opiacés, centres de soins, prévention en milieu festif. Une réussite en matière de politique de santé publique aujourd’hui mondialement reconnue.

Cannabis et inégalité raciale aux Etats-Unis

Aux États-Unis les Noirs sont arrêtés par la police en raison du cannabis 3,7 fois plus que les Blancs. Cela est vrai dans tous les États, à la campagne comme en ville. Ce n’est pas juste. Nous ne sommes pas plus en sécurité. Cela gaspille des ressources publiques. Et cela détruit de nombreuses vie chaque années. Pourtant Blancs et Noirs consomment tout autant du cannabis.Cette vidéo illustre le rapport intitulé « La guerre en Noir et Blanc du Cannabis » de l’ACLU (Union Américaine pour les Libertés Civiles).

Brisons le tabou ! Un documentaire et une pétition contre la prohibition

Raconté par Morgan Freeman, ce documentaire lève le voile sur l’échec de la Guerre à la Drogue menée par les Nations-Unies, son origine et l’impact effroyable qu’elle a sur des États tels que la Colombie, les Etats-Unis d’Amériques ou la Russie. Avec la participation de personnalités de premier plan comme Bill Clinton ou Jimmy Carter.

La guerre contre la drogue a échoué. Après 50 ans d’interdiction, les drogues illicites sont désormais la troisième industrie la plus rentable au monde après la nourriture et le pétrole, aux mains des criminels. Les drogues sont moins chères et plus accessibles que jamais. Des millions de personnes sont en prison pour des délits liés aux drogues. La corruption et la violence, en particulier dans les pays producteurs et de transit, met en danger la démocratie. Des dizaines de milliers de personnes meurent chaque année en guerre de la drogue.

L’amélioration de nos politiques sur les drogues est l’un des principaux défis de notre temps. Le temps est venu d’agir.

Nous vous appelons à mettre fin à la guerre contre la drogue et le régime d’interdiction, et d’aller vers un système basé sur la décriminalisation, la régulation, la santé publique et l’éducation. Cette politique de 50 ans a échoué, favorise les crimes violents et les système mafieux, dévaste des vies et coûte des milliards. Il est temps d’adopter une approche humaine et efficace.

>Signez la pétition<

Breaking Bad Saison 5, 1ère partie

Walter a gagné. Il s’est débarrassé de son patron, Gus Fring, l’ennemi juré de la saison 4. Que va-t-il faire maintenant qu’il est libre ? Arrêter la production de méthamphétamines et reprendre une vie normale ou devenir calife à la place du calife ? En toute logique avec l’évolution du personnage, il choisira cette dernière voie. Qu’il semble loin le petit prof de chimie non fumeur ayant raté les cinquante premières années de sa vie et qui se découvre atteint d’un cancer du poumon. Dans cette saison, Walter fête ses 51 ans. Un an seulement s’est écoulé depuis le début de la série. Quelle densité et quelle rapidité pour devenir un « parrain de la drogue ». Cette ascension sociale fulgurante dans le monde du crime organisé rappelle à Walter combien il était un jeune étudiant ambitieux qui n’avait pas su saisir les bonnes opportunités à l’époque.

Il n’avait simplement pas imaginé qu’il réaliserait son rêve de pouvoir dans le trafic de stupéfiants. Qu’importe ! Le rêve américain n’a pas d’odeur et il l’embrasse pleinement au mépris de la loi, de sa famille, de ses amis, de lui-même. Sa cupidité est sans limite, au point que sa femme n’arrive plus à blanchir les billets qui rentrent trop nombreux et trop vite.

Tel un dealer sans scrupule qui, après vous avoir accroché, arrête de vous fournir, la chaîne de télé AMC a décidé de diffuser la saison 5 en deux parties. Les 8 premiers épisodes sont passés entre juillet et septembre et les 8 prochains, devant clôturer définitivement la série, ne le seront pas avant… l’été 2013 ! En cas de crise de manque, le coffre DVD/Bluray des 3 premières saisons vient de sortir avec de nombreux bonus. La saison 4 sort en DVD fin décembre.

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Cet article partie du dossier Serial Dealers.

Weeds saison 8 finale

La chaîne de télé américaine Showtime a allumé son splif en 2005. Carton immédiat. Weeds, avec sa mère de famille dealeuse de beuh, est devenue le fer de lance de la chaîne. Sept ans plus tard, c’est l’heure de la dernière bouffée après deux ans de sursis.

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Avant

Les fans de la série pensaient que la saison 7, commandée in extremis par la chaîne, serait la dernière car elle n’avait pas pré-acheté de nouvelle saison. En septembre 2011, l’épisode final était décevant car Nancy, qui semblait prête à se retirer des affaires, se faisait tirer dessus lors d’un happy end familial. La morale est celle de tous les films de gangsters : se retirer est impossible, le business vous rattrape toujours. La saison 6 ayant déjà failli être la dernière, la plupart des amateurs de Weeds s’étaient résignés à cette conclusion beaucoup trop sage. Où était donc passé la provocation, véritable marque de fabrique de la série ? Certains se consolaient en pensant que ce choix scénaristique était en lui-même provoquant par sa non-provoc’. Heureusement, l’espoir revint en janvier 2012 lorsque les producteurs de la série annoncèrent une ultime saison pour l’été.

Reboot

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Après

La saison 8 comprend 13 épisodes diffusés entre juillet et septembre 2012. Elle reprend là où s’est arrêtée la saison précédente : Nancy s’est pris une balle dans la tête mais en réchappe. En sortant du coma, elle se jure de ne plus dealer et de devenir une bonne personne, une bonne mère, de se trouver un mari et un boulot honnête. La bonne trouvaille des auteurs est de créer des situations qui vont mettre à l’épreuve Nancy et ses nouvelles résolutions. Surtout que son fils aîné est bien décidé à continuer le business. Les incontournables de la série sont là comme une efficace routine : les frasques sexuelles d’Andy, le cynisme de Doug, l’hystérie de Jill, la MILF de Silas, les personnages secondaires excentriques, les come-back inattendus…

Andy + Nancy = ?

Qui dit ultime saison dit dénouement. C’est en réalité un vrai message politique que nous délivre Jenji Kohan, la créatrice de la série. Ceux qui ne veulent pas trop en savoir avant d’avoir vu les épisodes ne devraient pas lire la suite. Si la belle Nancy renonce à dealer, elle compte bien mettre à profit ses talents et son expérience acquise dans ce domaine. Les dealers légaux que sont l’industrie pharmaceutique et celle du tabac vont pouvoir profiter de son sens des affaires. Le nombre d’États autorisant le cannabis thérapeutique s’accroît et ce marché devient intéressant pour les laboratoires. Nancy et Silas se font donc naturellement embaucher. C’est ensuite un géant du tabac qui tente de les engager. Persuadée que le cannabis récréatif sera prochainement légalisé, la compagnie souhaite être prête à produire en masse des cigarettes au THC dès que la loi changera. Production, transformation, packaging, marketing et diffusion, tout doit être prêt. Nancy recrute ses anciens complices pour mener à bien cette mission.

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THC à maturité

L’épisode final nous projette en 2019 et donne raison à ce scénario. Nancy est à la tête avec son fils de la plus grande chaîne de coffee shops des USA, que Starbuck essaye de racheter. Les années de galère dans l’illégalité des saisons précédentes résonnent alors comme une période adolescente : mouvementée et transgressive. Tous les personnages qui avaient choisi ce mode de vie sont devenus adultes en même temps que la société l’est devenue sur cette question de la régulation du cannabis. En s’institutionnalisant, cette activité s’assagit et avec elle, la vie des héros de Weeds (sauf un !). La fin de leurs aventures s’impose et donc celle de la série. Aucune frustration cette fois. Si vous avez gâché une partie du suspens en lisant jusqu’ici, l’issue de la relation entre Nancy et Andy vous est toujours inconnue. Finissent-ils ensemble ?

Série de Jenji Kohan, 8 saisons, 2005-2012. Disponible en DVD, Blue Ray et VOD.

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Weeds saison 7 vs Breaking Bad saison 4

Hasard du calendrier ? Concurrence entre chaînes ? Stratégie de consolidation réciproque de l’audience ? Cette année, les deux séries américaines suivies de près par Asud-Journal depuis le numéro 44 ont été diffusées selon le même timing durant l’été. Breaking Bad le dimanche et Weeds le lundi. Impossible dans ces conditions de ne pas jouer au petit jeu des similitudes et des différences.

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Previoulsy on…

Breaking Bad : À la fin de la saison 3, Walter et Jessie sauvaient leurs vies in extremis en se débarrassant du seul chimiste capable de les remplacer pour fabriquer la fameuse méthamphétamine bleue. N’ayant d’autre choix que de les garder pour continuer ses affaires, leur patron devient alors leur pire ennemi et cherche à se venger toute la saison durant.

Weeds : Le final de la saison 6 était certainement l’un des plus réussis car le suspense était à son comble. Pour sauver sa peau face au cartel de Tijuana et protéger sa famille, Nancy trouvait le moyen de se faire arrêter par les stups avec son bébé tandis que le reste de sa troupe s’envolait pour Copenhague. Le jubilatoire road movie à travers l’Amérique qui précédait ce final rendait tous les scénarios possibles : délocalisation de la série en Europe pour une joyeuse cavale (on rêverait d’un détour par la France !) ou huis clos façon Prison Break. Avec surprise, la série se pose à New York, en plein Manhattan quelques années plus tard. Nancy n’est pas assagie et ses fils lui ressemblent de plus en plus. Le business familial repart à zéro ou presque.

Dealer, un métier comme un autre…

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Boulot, boulot, boulot.

…la reconnaissance en moins. Malgré leurs différences de forme et d’esthétique notables (la réalisation de Breaking Bad est toujours aussi soignée et trouve sans cesse de nouveaux cadrages inventifs ; celle de Weeds s’apparente plutôt à une sitcom de luxe), les saisons 2011 traitent de thèmes finalement assez proches. Le plus flagrant est la relégation au dix-huitième plan de ce qui était pourtant le déclencheur de ces deux séries et de l’activité illégale des personnages principaux : le besoin d’argent, beaucoup et rapidement. Certes, quelques échéances de paiement parsèment ces séries à l’occasion. Mais elles sont timides et peu convaincantes et ne tourmentent pas les personnages comme à leur début. Pire, le souci principal de Walter et (surtout) de Skyler White de Breaking Bad est à présent le blanchiment de leurs faramineux revenus. Quant à Nancy, elle dégotte même un bon boulot de secrétaire dans une grosse boîte de Wall Street. À l’abri du besoin, nos héros dealers continuent pourtant à enfreindre la loi. La vérité est ailleurs, comme dirait l’autre. Le spectateur lambda se contentera d’une explication mécanique simpliste, sorte de théorie de l’escalade ou de la dépendance appliquée aux dealers : quand on trafique avec des gens pas très fréquentables, il n’est pas facile de s’en défaire. C’est pas faux. Mais à plusieurs reprises, Walter et Nancy ont réellement l’occasion de tout arrêter et ne le font pas. De nombreuses fois, on peut également voir ou entendre leur fierté d’être doués pour leur activité ou encore leur désarroi de ne pas être reconnu à leur juste valeur. Tous deux se voient comme des travailleurs qui excellent dans leur job : rigueur, dévouement, efficacité…

Breaking Bad : Après la mort de l’assistant de Walter, la police met la main sur son carnet de notes. Celui du plus grand labo de crystal-meth aux USA. Pour la DEA, c’est sûr ! Le grand chimiste qu’ils recherchaient est mort. Piqué au vif qu’un autre hérite du titre qui lui revient, Walter, au lieu d’être soulagé de ne plus être recherché, examine le carnet et laisse entendre aux stups (par l’intermédiaire de son beau-frère flic) qu’il s’agit d’un plagiat en affirmant que le mort n’était qu’un exécutant. Le génie, lui, courrait toujours.

Weeds : Lassée d’être prise pour une simple secrétaire, Nancy révèle à ses employeurs – les gérants d’un fonds de pension – qu’elle deale de l’herbe et leur présente son astucieux business plan pour conquérir la même clientèle de luxe que la leur. Un partenariat inattendu.

L’ennemi intime

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Dans les yeux, j’ai dit.

Ce changement de mentalité ajoute une certaine antipathie à l’égard des deux personnages principaux, au fur et à mesure qu’ils assument leur statut de criminel tout en renforçant leur ego et leur solitude. À l’écran, cela se traduit par une logique de concurrence, voire d’affrontement, avec leur(s) proche(s) et complice(s). Un lancinant « je t’aime, moi non plus » dont les scénaristes ne devront pas abuser trop longtemps pour qu’il reste intéressant. Sur ce terrain, Nancy se retrouve à nouveau (voir la saison 4) en gentille guerre ouverte contre son fils aîné, Silas. Tandis que Walter mène une guerre de tranchées psychologique avec Jessie qui se termine en apothéose avec l’ultime séquence de la saison. Chapeau les scénaristes !

Usagers cachés

Autre point commun : la quasi-disparition des scènes de consommation de produits dans les deux séries. Peu étonnant pour Breaking Bad et son parti pris drogue=déchéance. Mais si les joints restent omniprésents dans Weeds, ils sont complètement banalisés et ne donnent plus lieu aux scènes délirantes auxquelles nous avait habitués la série. De part et d’autre, en guise de produit de substitution, l’alcool nous livre heureusement quelques bonnes murges comiques et télégéniques.

2012, le new deal

Les dénouements respectifs de ces deux saisons pourraient très bien être leur point final. Elles ont été écrites comme s’il s’agissait des dernières saisons. Obligeant les scénaristes à prévoir l’éventuel arrêt définitif de leur série, les chaînes ont tardivement reconduit leurs achats pour les saisons suivantes en raison de la crise économique et de la concurrence sur le marché des séries américaines. La chaîne AMC a annoncé qu’il y aurait l’an prochain une dernière saison de Breaking Bad, mais Showtime n’a toujours rien confirmé pour Weeds.

Encore là où on ne les attendait pas, les auteurs de Weeds terminent la saison sur un inattendu happy end dans une vision toute spielbergienne de la famille, même si la morale de la famille en question penche plutôt vers celle de la famille Adams.

Les fans ne pourront toutefois pas se résoudre à l’arrêt de la série car la dernière image de l’épisode final prendrait alors une tournure moralisatrice et politiquement correcte, en complet désaccord avec l’esprit de la série depuis sept ans. À l’inverse, Breaking Bad continue d’enfoncer subtilement le clou de l’immoralité en reposant sans cesse la question : jusqu’où peut-on aller pour sauver sa peau ? Dans les deux cas, une page est tournée et allez savoir ce que nous réserve 2012.

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Serial dealers : Weeds (saisons 1 à 6) vs Breaking bad (saisons 1 à 3)

On a beau militer pour la légalisation des drogues, il faut bien reconnaître que sans leur prohibition, de nombreuses créations culturelles ou divertissements – tous domaines confondus – avec lesquels nous nous délectons n’auraient jamais vu le jour.

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Antihéros

L’exception anglaise dès 1992

Dès 1992, les très politiquement incorrectes Eddy et Patsy, 2 londoniennes de 40 ans portées sur le sexe et les drogues sévissaient à la télévision britannique dans la série satirique Absolutely Fabulous (Ab Fab pour les fans). La défonce n’est pas le sujet principal de l’histoire, elle y est tout bonnement et naturellement intégrée aux intrigues, tout comme les 2 protagonistes sont parfaitement intégrées socialement : l’une dirige une agence de communication, l’autre est journaliste de mode. Leurs aventures ainsi que leurs expériences psychédéliques se sont achevées en 2004 avec le sourire. Point de morale à 2 balles. Ouf !

Les séries, notamment américaines, ont pendant longtemps dérogé à cette règle en traitant le sujet des drogues de façon simpliste et manichéenne, quel que soit le genre de la série.

Le registre comique se contentait généralement de créer des situations décalées avec des personnages temporairement sous effets à leur insu. Les séries pour jeunes et les feuilletons connaissent toutes une période pendant laquelle l’un des héros se défonce, d’abord pour s’amuser, puis devient forcément accro avant de redevenir abstinent, tout en tirant une bonne leçon de cet épisode. Quant aux séries policières, les drogues ont permis à des générations de héros armés, de Rick Hunter aux Experts, de pouvoir trouer à la peau sous nos applaudissements à tout un tas de drogués et dealers, « parce qu’ils le valent bien » comme seule justification.

Si l’on admet que les séries reflètent fidèlement leur époque, miroir, mon beau miroir où en sommes-nous aujourd’hui ? Depuis l’an 2000, les antihéros ont la côte. Le public aime ça, et les scénaristes hésitent de moins en moins à leur affubler toutes sortes de traits de caractère profondément (in)humains, sans que l’intrigue principale n’ait pour objectif sa modification et encore moins son amélioration. Dr House ne deviendra pas sympa, le héros de Californication continuera à baiser tout ce qui bouge, et Dexter ne renoncera pas à tuer.

Desperate housewife de 35 ans vs prof médiocre de 50 ans

Suivant cette tendance, 2 séries ont pour personnages principaux des trafiquants drogues : Weeds, créée en 2005, et Breaking Bad, en 2008. Résumé des épisodes précédents…

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Desparete housewife de 35 ans

Weeds : Nancy est une desperate housewife de 35 ans vivant dans une banlieue californienne pour classes moyennes, dans le genre de lotissement où l’on clone aussi bien les villas avec piscine que leurs occupants, mariés, 2 enfants. Tout est lisse et propret. Malheureusement un jour, son ingénieur de mari décède d’une crise cardiaque pendant son jogging. Pour maintenir son train de vie, nourrir ses 2 fils et payer ses crédits, notre mère de famille modèle décide de se lancer dans le deal de weed, c’est-à-dire de beuh.

Breaking bad titreBreaking Bad : Walter est un homme médiocre de 50 ans qui vit à crédit au Nouveau-Mexique avec son fils handicapé et sa femme enceinte. Cumulé à un second emploi de laveur de voitures, son salaire de simple professeur de chimie dans un lycée ne suffit pas à régler les factures de leur couple routinier. Son médecin lui apprend qu’il a un cancer des poumons et qu’il lui reste trois mois à vivre. Les choses tournent mal (« breaking bad ») pour ce non-fumeur, qui décide de prendre son destin en main en fabricant et vendant de la méthamphétamine pour gagner assez d’argent afin que sa famille n’hérite pas de ses dettes et accessoirement, pour pouvoir tenter un traitement.

Justifier l’activité criminelle

Le point commun flagrant entre ces 2 séries est l’argument invoqué pour expliquer la transformation d’un citoyen ordinaire respectueux des lois et apolitique en trafiquant de stupéfiants. Comme si la peur imminente de perdre cet American way of life familial était la seule raison valable permettant au public de s’identifier et d’excuser Nancy et Walter. Ces 2 personnages sont des êtres rationnels confrontés au besoin de gagner rapidement de l’argent. En bons Américains moyens, ils savent par la télé que LA drogue, c’est mal, d’ailleurs ils ne consomment pas. Mais ils savent de la même façon que le deal, c’est de l’argent facile. C’est en tout cas ce qu’ils croient au début car très vite, les difficultés se succèdent (d’où l’intérêt d’en faire une série), remettant ainsi en cause la véracité de leurs idées reçues sur les drogues et ceux qui en consomment.

Une certaine éthique du deal

D’autres paramètres viennent renforcer le bien-fondé de leur choix. Dans Weeds, Nancy se donne une ligne de conduite en refusant de dealer des drogues dites « dures » ou d’en vendre à des enfants. Deux règles qu’elle enfreint à plusieurs reprises, notamment la seconde lorsque son fils ainé, fumeur, devient l’un de ses revendeurs puis son chef de production.

Dans Breaking Bad, Walter est avant tout fabricant du produit. Son objectif d’amasser beaucoup d’argent en peu de temps le pousse très vite à vendre en gros. Il conserve ainsi une certaine distance avec le deal de rue. De plus et contrairement à ses concurrents peu scrupuleux, il met un point d’honneur à fournir un produit d’une très grande qualité. Dans la dernière saison, il s’oppose à ce que 2 caïds utilisent un gamin de 11 ans pour vendre sa méthamphet’.

Enfin, tous deux refusent a priori la violence même si au fil des saisons, ils sont souvent amenés à y recourir en raison du milieu criminel dans lequel ils évoluent. C’est bien souvent la légitime défense, leur propre survie ou celle de leurs proches qui sert à justifier de tels actes.

Mais que fait la police ?

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Green washing

Dans ces 2 séries, la police – et plus particulièrement la DEA (les stups américains) – joue un rôle important dans les rebondissements de l’histoire. On y découvre les liens complexes entre ces flics, tiraillés par le besoin de remonter les filières toujours plus haut et donc de fermer les yeux sur les trafics subalternes, et ces trafiquants, qui n’hésitent pas coopérer en échange d’une protection ou si cela peut faire tomber un de leur concurrent. Jusque-là, rien de vraiment nouveau mais ces séries vont aussi jouer la carte de la relation intime…

Weeds : Le premier homme que Nancy fréquente sérieusement suite à la mort de son mari est, comme par hasard, un agent de la DEA dont elle ignore la fonction dans la saison 1. Détail qui va se révéler déterminant dans les saisons suivantes. Celui-ci est en effet au courant des activités de Nancy dont le business n’est pas assez gros pour qu’il s’y intéresse, jusqu’à ce qu’elle le quitte. Dès lors, elle sera la cible des flics.

Breaking Bad : Le beau-frère de Walter travaille aux stups comme enquêteur principal. Dans le premier épisode, c’est même lui qui va créer le déclic chez Walter, lors d’une discussion de boulot évoquant les gains des dealers de crystal-meth. Des liens familiaux très forts relient les deux hommes, mais leurs convictions respectives les empêchent de partager un tel secret.

Complices et confidents

Le secret est justement le principal ressort dramatique des 2 séries. D’abord, le secret vis-à-vis de la famille qu’il faut protéger d’une éventuelle complicité mais dont il faut aussi conserver le respect. Ensuite, le secret relatif au quotidien d’une activité criminelle (production, transport, blanchiment…). Des secrets qui doivent pourtant parfois être levés pour mener à bien leurs petits trafics. Les complices de fait sont souvent les consommateurs, dans leur propre intérêt évidemment.

Weeds : Trop extravertie, Nancy est vite démasquée par son entourage, notamment par ses 2 fils, dès la saison 1. En parallèle, elle se bâtit une équipe d’assistants aux compétences variées parmi ses fidèles clients : un avocat, un comptable qui est aussi conseiller municipal, un commercial, et un spécialiste en culture hydroponique.

Breaking Bad : Ne sachant comment faire, Walter s’entiche d’un junky notoire, ancien élève de son lycée doué en chimie, renvoyé pour deal de meth et toujours dans le business. Grâce à Walter, il va pouvoir gravir un échelon et convaincre ses clients de dealer dans la rue à sa place. Dans la saison 2, une péripétie judiciaire va rendre incontournable la présence d’un avocat ripou dans l’affaire. Il faut attendre 2 saisons et demie pour que le secret de Walter s’invite dans la cellule familiale et la fasse exploser.

Et la conso dans tout ça ?

Ni Nancy ni Walter ne sont consommateurs. Pourtant, chacun d’eux tirera sur un joint dans l’un des épisodes dans un moment de désarroi. Mais rassurez-vous, ces dérapages seront bien vite maîtrisés.

Weeds : Pratiquement tous les personnages de la série fument de la beuh. Les plus gros consommateurs sont aussi les plus débiles et/ou les plus incompétents du groupe. La seule qui ne fumait pas va développer un cancer du sein et va fumer pendant sa chimio (saison 1), puis tomber dans l’alcool (saison 2), et enfin dans la coke (saison 4).

Breaking Bad : La consommation de méthamphétamine sur laquelle repose tout le business de Walter est systématiquement associée à la déchéance et/ou à la dépravation. Bref, la série ne veut surtout pas cautionner la consommation de meth. Ceci dit, il y a très peu de scènes de ce type. L’héroïne est aussi présente dans la saison 2 et mènera sa consommatrice à une overdose mortelle. Pour couvrir son activité et justifier ses appels à un dealer, Walter préfèrera dire à un moment qu’il a fumé de la beuh pendant sa chimiothérapie. L’indulgence de ses proches est immédiate et son beau-frère des stups lui propose même de lui en procurer.

Réellement subversif ou faussement transgressif ?

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Money washing

Dans les 2 séries, le message est clair : c’est grâce à leur non-consommation que Nancy et Walter sont les cerveaux de leur bande. De la même façon, la caution morale repose sur la thèse du cannabis comme seule et unique drogue douce, à condition d’en user avec modération comme pour l’alcool. Toute autre consommation est implacablement dénigrée.

Mais cela n’empêche pas ces séries d’aborder, mine de rien et frontalement, ce qui cloche avec la prohibition des drogues. Dans ce domaine, la violence et la corruption sont en haut de l’affiche. Weeds explore davantage la corruption et son fidèle compère, l’hypocrisie. Le summum étant, dans les saisons 4 et 5, le personnage du maire de Tijuana au Mexique qui mène publiquement des programmes antidrogues tout en étant, dans le privé, le chef du cartel local. Si dans Breaking Bad les flics sont plutôt intègres et les politiciens absents, on plonge rapidement dans un univers criminel dont le potentiel violent peut exploser à tout moment. On surprend alors Walter rêver que la fabrication de méthamphétamine est tout ce qu’il y a de plus légal.

Le manuel du savoir dealer

Le manuel du savoir dealer que représentent ces séries n’est pas inintéressant. De la production à la consommation, en passant par le transport et le blanchiment de l’argent ainsi gagné, toutes les étapes y sont scrupuleusement décrites au fil des épisodes.

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Prof médiocre de 50 ans

Une particularité de Weeds est d’intégrer des éléments d’actualité dans son scénario, ce qui plombe un peu le rythme depuis la saison 4. En effet, la consommation médicale de beuh est si développée en Californie que la principale raison d’être de la série devient obsolète. Pour palier à cela, les auteurs ont tenté plusieurs pistes. Premièrement, transposer leur activité dans le milieu de l’immigration clandestine, l’image populaire du passeur exploitant la misère de quelques-uns n’ayant rien à envier à celle du dealer de drogues. Dans les 2 cas, on oublie en effet qu’il il y a une demande avant l’offre. Deuxièmement, ouvrir une boutique légale de vente de produits à base de cannabis sur ordonnance compte tenu de la nouvelle législation. Et troisièmement, faire traverser la frontière mexicaine à certains personnages afin de retrouver une situation similaire à celle qui faisait le succès de la série à ses début (prohibition, corruption et trafic). Bref, ça part dans tout les sens.

Breaking Bad n’a que 3 saisons à son actif et n’a donc pas encore joué tous ses atouts. D’autant que la crystal-meth n’est pas près d’être légalisée, ce qui réduit les risques d’une nouvelle panne scénaristique. En trois ans, le côté déjanté et drôle du début s’est cependant sérieusement assombri. La dernière saison ne compte que 2 épisodes à l’humour franc et décalé, dont l’un assez mémorable où 3 revendeurs n’ayant plus de territoire pour dealer décident d’investir des groupes de parole d’abstinents pour promouvoir subtilement leur produit et s’ouvrir les portes d’un nouveau marché : les abstinents prêts à rechuter !

Bonjour, je m’appelle Pete, je ne prends plus rien depuis 3 mois mais hier, j’ai craqué. Un ami m’a proposé la fameuse amphet’ bleue dont tout le monde parle en ce moment.
Ah, oui ! Il paraît qu’elle te retourne le cerveau comme jamais. Une fois, j’en ai pris et c’était le meilleur trip de toute ma vie.

Un sujet dont on rit de bon cœur

L’accord Mildt -CSA

De puis 2008, sous l’impulsion de la Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (Mildt), le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) « interdit de faire apparaître à l’antenne toute drogue illicite ou toute personne en consommant […] ainsi que de relater de manière positive ou équivoque la consommation de drogue. S’agissant des émissions d’information et des documentaires, des drogues illicites ou des personnes les consommant peuvent y apparaître, dès lors que cela entre dans l’objet de l’émission ou du documentaire et que ces programmes ne sont en rien incitatifs, c’est-à-dire que la consommation et la personne consommant de la drogue ne sont en aucun cas valorisées. »

On comprend alors aisément pourquoi tous les reportages sur les drogues sont toujours aussi stigmatisants et si peu réalistes. Et surtout pourquoi on ne se marre jamais sur ce sujet. Il ne faudrait pas le valoriser !

De plus, « les programmes susceptibles de présenter un risque de banalisation de prise de drogues illicites [doivent faire apparaître] l’avertissement suivant : L’usage de produits stupéfiants est dangereux pour la santé et interdit par la loi. Pour plus d’informations et recevoir de l’aide, téléphonez au 0800 23 13 13 (Drogues Info Service). » Une mesure qui fleure bon l’ORTF de grand-papa à l’heure de la TNT et d’Internet…

Car c’est bien cela le plus subversif de ces séries : faire des drogues et de leur quotidien un sujet comique dont on rit de bon cœur. Pas une moquerie de plus envers les drogués ni une blague hermétique aux nonconsommateurs. Non, de vrais moments où chaque éclat de rire partagé vient ébrécher un peu plus les clichés et le sérieux imposé dès qu’il est question des drogues et de ceux qui en prennent. Évoquer les drogues concrètement et à la légère est tabou. Le risque de voir s’effondrer le mythe du « fléau de l’humanité », tel un tour de magie qui n’impressionne plus personne dès qu’on en connaît le « truc », est trop grand pour les gardiens de cette idéologie.

Est-ce pour cela que Weeds et Breaking Bad sont péniblement diffusées à la télé française, malgré le succès d’audience outre-Atlantique ? Aucune des grandes chaînes interrogées sur la question n’a confirmé ni infirmé cette hypothèse. Il faut dire que le récent partenariat Mildt-CSA (voir encadré) veille à la bonne moralité des programmes diffusés. Quant à avoir une série française du même genre, ce n’est pas demain la veille. En attendant, on devra se contenter des flics accrocs de Braco sur Canal+, ou encore des allusions au cannabis thérapeutique dans plusieurs épisodes de Plus belle la vie sur France 3.

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Cet article fait partie du dossier Serial Dealers.

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