Auteur/autrice : Le CIRC

Appel du 18 joint 2016 : 40 ans que dure !

En 1993, le CIRC (Collectif d’Information et de Recherche Cannabique) réactivait l’Appel du 18 joint, lancé en 1976 par quelques fougueux journalistes de Libération et d’Actuel, une initiative qui demandait « la dépénalisation totale du cannabis, de son usage, de sa possession et de sa culture. »

Quarante ans plus tard, le texte de l’Appel n’a, hélas, rien perdu de son actualité. Alors que la société a radicalement changé et que les mœurs ont évolué, la loi votée en 1970 n’a cessé, elle, de se durcir. Comme le notait le texte originel, le discours stigmatisant sur le cannabis « permet de maintenir et de renforcer une répression de plus en plus lourde… Des arrestations massives de jeunes… ». Une politique qui « justifie la détention de centaines de personnes… des emprisonnements qui frappent en priorité la jeunesse » issue des quartiers populaires et de l’immigration.

Aujourd’hui, force est de constater que la répression du cannabis a coûté très cher et attisé les flammes de l’incendie qu’elle était censée éteindre en dynamisant le trafic et en multipliant le nombre de consommateurs.

Le cannabis n’est pas interdit parce qu’il pose un problème de santé publique, mais principalement pour des raisons culturelles et politiques.

Outre-atlantique, dans le pays qui a mené une guerre acharnée contre « la drogue », la moitié des États ont légalisé le cannabis thérapeutique et plusieurs d’entre eux ont réglementé sa production, sa distribution et sa consommation récréative, ouvrant la voie à une nouvelle économie florissante… Aujourd’hui, les nombreux pays qui ont assoupli leur législation s’en félicitent.

En France comme partout en Europe, et quelle que soit la législation, l’économie du cannabis se manifeste par la présence de centaines de commerces proposant tout le matériel nécessaire (et parfois des graines), pour s’adonner en toute sérénité à la culture domestique du cannabis. Une activité qui génère déjà des dizaines de milliers d’emplois directs et indirects, lesquels se multiplieront le jour où nos députés daigneront admettre que la consommation de cannabis est intégrée dans nos mœurs et qu’il faut l’encadrer.

Il ne s’agit donc plus désormais de débattre sur la pertinence de la prohibition, un échec indiscutable, mais de travailler sur une alternative qui redonnera au cannabis sa liberté et à ses usagers leur dignité.

Parce que le cannabis est un sujet trop complexe pour être laissé aux seuls politiciens, le CIRC appelle les associations, les personnalités du monde artistique, médiatique, sportif et les simples citoyen(ne)s, à s’emparer du sujet.

Par le présent appel, nous exigeons du gouvernement qu’il abroge l’article L.3421-4 du Code de la Santé Publique punissant la « présentation sous un jour favorable des stupéfiants », mesure nécessaire pour permettre la tenue d’états généraux réunissant institutions et associations afin d’engager une réflexion sur la sortie de la prohibition du cannabis.

Appel 18 joint
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La CIRC évolution

Après de longues années de silence où seul son groupe lyonnais maintenait la barre, la Fédération des CIRCs reprend le combat. Quelques remous internes et surtout une actualité internationale sans précédent auront suffit à réveiller le monstre. À l’occasion de son assemblée générale qui s’est tenue début novembre à Lyon, notre association s’est longuement penchée sur ces deux dernières décennies et les actions menées.

L’âge d’or de l’antiprohibitionnisme cannabique

Au début des années 90, l’obscurantisme en matière de drogues, bâtait son plein. Le sujet était monopolisé par les partisan(e)s du système prohibitionniste, LA drogue était Le mal, on escaladait forcément le chanvre festif pour atteindre les sommets des opiacés, et que dire de la parole des usagers d’alors ? Puis vint un livre, promu au rang de « bible des cannabinophiles », Fumée Clandestine, parut en pleine paranoïa. De réunions en conférences, nous nous aperçues très vite que d’autres initiatives du même genre étaient menées du côtés des « injecteur(triche)s ». Sans aucune concertation, un groupe d’auto-support voyait le jour, Asud. Si les cannabinophiles n’avaient qu’à combattre des idées reçues et tout un tas contre-vérités assénées par des idéologues réacs, les usager(e)s de drogues injectables se retrouvaient, eux/elles, face à  un véritable problème de santé publique avec la diffusion de virus mortels dans leur « communauté », ceux du VIH et de l’hépatite.

Réuni(e)s sous le drapeau de la RdR, mais aussi sous celui de l’antiprohibition, usager(e)s et professionnel(le)s obtinrent des avancées indéniables. Mais à la réforme profonde, voire l’abolition pure et simple de la Loi du 31 décembre 1970, certain(e)s préférèrent se contenter de la substitution pour répondre à l’urgence de la situation sanitaire consommateur(trice)s.

Ces dix années (1990/2000) auront permis de contribuer à une approche plus pragmatique de la question des drogues par les autorités. La prévention prenait le pas sur la répression et pendant un temps, nombreux(euses) étions-nous à croire en une possible sortie de la prohibition, tout du moins pour la filière chanvre. C’était le pari du CIRC que de parvenir à provoquer chez les cannabinophiles, cette envie de participer au débat national en intervenant directement dans leur environnement proche. Bref à libérer la parole pour rendre plus évidente l’hypocrisie ambiante.

Ce pari fut en parti gagné. Vers la fin des années 90 et à l’occasion de la campagne de prévention organisée par la Mildt, « savoir plus risquer moins ! «  notre mouvement en détourna le slogan pour lancer la sienne  : « Cultivez plus, risquez moins ! ».

L’autoproduction devenait notre nouveau cheval de bataille. Des centaines de boutiques proposant le matériel nécessaire à la production domestique de chanvre récréatif allaient voir le jour partout en France. Quelques audacieux allèrent jusqu’à proposer des graines. De nombreux ouvrages consacrés à ce genre jardinage , furent publiés, traductions de livres étrangers, mais aussi originaux français. Une maison d’édition y consacra toute son énergie, les Éditions du Lézard qui, aux côté du CIRC, contribuèrent largement à dynamiser le mouvement.

Une pause et ça repart !

Et puis… et puis… et puis le militantisme, la dynamique d’un mouvement dépendant de ses activistes, le manque de renouvellement, mais aussi d’autres projets sur d’autres fronts firent que le CIRC entra en mode sommeil. La lâcheté de la « Gauche » sur le sujet, les désillusions que cela entraîna et le retour d’une Droite décomplexée eurent sans doute un peu raison de notre enthousiasme des débuts. Mais le vent tourne, et généralement jamais d’où on l’attend.

En Europe mais aussi en France, ce sont les Cannabis Social Club qui firent leur apparition, une nouvelle impulsion s’il en est, pour le mouvement cannabique. À l’international, c’est de l’autre côté de l’Atlantique qu’il souffle, du pays même qui, depuis près d’un siècle, impose sa vision morale, raciste et autoritaire des drogues. Aux États-Unis d’Amérique dont une bonne vingtaine d’États ont dors et déjà autorisés l’usage thérapeutique du chanvre et sa vente sous ordonnance, deux d’entre eux ont choisi, par voie référendaire, de légaliser l’ensemble de la filière récréative de la plante.

Plus au sud, c’est un tout petit pays qui va devenir le premier à mettre en place une règlementation complète de cette même filière. Et ses voisins de réfléchir à leur tour à cette idée. Plus près de nous, de l’autre côté du détroit de Gibraltar, c’est le premier pays producteur de haschisch, le Maroc, qui voit à son parlement, porté un projet de Loi identique par deux formations politiques, une coalition progressiste de gauche et un parti plutôt conservateur. À l’est de l’Europe, ce sont de nouveaux membres de la communauté européenne qui font d’autres choix que celui de la répression aveugle. Mais c’est sans compter sur l’ « exception cul-culturelle » de la France, ce charmant village gaulois qui, au centre du vieux continent, résiste au pire, mais aussi au meilleur. Et nos dirigeant(e)s d’agiter le chiffon rouge de LA jeunesse pour justifier l’injustifiable, de prétendre vouloir la protéger en la harcelant quotidiennement à travers cette Loi inique.

C’est donc cette tempête, cet ouragan historique venu d’outre-atlantique, qui aujourd’hui re-mobilise les militant(e)s du CIRC, ce vent que nous nous devons d’accompagner pour qu’il vienne frapper à leur tour les côtes françaises. L’inéluctabilité de la fin de la prohibition étant à présent évidente, dénoncée de part et d’autre, à droite comme à gauche, par des économistes comme par des scientifiques, ça n’est plus qu’une question de temps que ne semblent toujours pas percevoir le gouvernement.

K Shoo, Porte parole du CIRC

Prohibition : une gabegie qui ne dit pas son nom

Communiqué

Règlements de compte en hausse, multiplication des saisies sur l’ensemble du territoire français, explosion de la consommation chez les plus jeunes, développement et enrichissement des réseaux criminels, difficultés croissante à mener une politique de prévention et de réduction des risques… les funestes conséquences de plus de 40 ans de prohibition des drogues n’en finissent pas.

Loin de susciter la moindre remise en question, cet incontestable constat d’échec semble provoquer chez nos responsables politiques, une réaction quasi unilatérale. Quand elles osent s’exprimer, les voix discordantes sont systématiquement ravalées, leurs arguments et propositions caricaturées à coup de mauvaise foi.

Qu’en est-il alors du débat démocratique dont se targue notre système politique ? Rien, que dalle, walou !

« Un problème créé ne peut être résolu en réfléchissant de la même manière qu’il a été créé.  »

disait Albert Einstein. Sur d’autres questions, une telle gabegie entrainerait une remise en question immédiate. En matière de drogues, il n’en est rien. Au contraire, non content de rendre impossible la vie de millions d’individus, d’offrir aux réseaux criminels les moyens de prospérer et d’en faire subir les effets à l’ensemble de la population, les tenants de cette politique calamiteuse en interdisent toute contradiction.

Alors que manifestement, de plus en plus d’États se posent la question du maintien de la prohibition, qu’en Amériques, continent où vit le jour cette politique, de nouvelles règlementations sont mises en œuvres en ce qui concerne le chanvre récréatif, l’Europe et en particulier la France s’entêtent dans la répression. La prohibition n’en finit pas d’agoniser. L’inéluctabilité de son abolition en rend d’autant plus insupportable l’aveuglement de ses partisans. Au dénie d’opinion s’ajoute le dénie de bon sens.

Jusqu’où ces tristes sires sont-ils prêts à aller ? Jusqu’où la société sera-t-elle de le supporter ? Combien de morts, de privation de liberté, d’infantilisation et de mensonges devrons-nous subir avant qu’enfin des alternatives soient envisagées, qu’une autre politique soit engagée ?

Alors que s’expriment plus que jamais dans notre société, les opinions les plus réactionnaires, les sentiments les plus vils, il est temps de réagir.

Nous, usagers des drogues, fumeurs, injecteurs, gobeurs, consommateur-trice-s hédonistes, récréatif-ve-s ou dépendant-e-s, mais aussi usagers thérapeutiques, parias des temps modernes, appelons une fois de plus au réveil et à l’insurrection des consciences. Parce qu’il n’existe pas de crime sans victime ; parce qu’user ou abuser d’une substance, quelle qu’elle soit, relève avant tout d’un choix individuel ; parce que la société se doit d’assurer sécurité et santé à l’ensemble de ses membres, nous demandons l’ouverture immédiate d’un débat national et européen sur le sujet des drogues et à l’étude tout aussi prompt d’une règlementation de la filière du chanvre récréatif et thérapeutique.

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