Auteur/autrice : Jean René Dard

Ballade chez les têtes à crack 1996

Tenter le crack, pour voir, par curiosité de vieux guerrier revenu des batailles, draguer un «pote» qui sait … et buter sur le caillou, comme un bleu. Témoignage.

Depuis un moment j’entendais les rumeurs les plus folles sur le crack. Ma curiosité toxicomaniaque en était tout émoustillée. Après 20 ans de carrière, j’avais à peu près essayé tout ce qui tourne sous le nom de drogues. Stabilisé à la méthadone, et bien que redoutant la cocaïne, je m’estimais assez aguerri pour tester en toute sécurité le mystérieux caillou.

Le discours alarmiste tenu sur le crack m’en rappelait d’autres et la perspective d’une bonne défonce sans avoir à me trouer les veines m’excitait méchamment. L’occasion de me déniaiser s’est présentée en mai. Un «pote» me proposa d’aller pécho du caillou, et vite fait mec. Le malin, connaissant le produit, avait vite compris le bénéfice à tirer de mon initiation. Car si acheter du caillou est facile, le fumer requiert de l’habileté. Bref, après dix minutes d’attente Porte de Clignancourt et en échange d’un pascal, quatre petites «plaquettes» passèrent de la bouche d’un modou aux nôtres.

En apnée

De retour dans la turne du pote, après quelques coups de cutter bien placés, la première bonbonne s’ouvrit découvrant un petit rock blanc, tendance jaunâtre ressemblant à une lamelle de savon ou à de la cire de bougie. Les yeux brillants d’excitation, mon initiateur prépare fébrilement la pipe, un doseur à pastis ébréché. Sur l’embout qui sert de fourneau il place un filtre, du fil électrique compressé, le chauffe puis pose dessus un bout du précieux caillou qui fond illico sur la ferraille incandescente. Angoisse et stupeur, le caillou se serait-il volatilisé avant même que j’ai pu en goûter?

Mon collègue cracker me rassure: le caillou à bel et bien fondu mais en s’imprégnant sur le filtre. Il ne reste plus qu’à chauffer ce bazar et en aspirer goulûment les vapeurs. Premier essai: loupé. J’ai recraché la fumée trop vite. L’autre tête à crack en profite pour me faire une démonstration gratuite: approchant la flamme du fourneau improvisé, il aspire lentement et longuement la fumée blanchâtre qui emplit le doseur, spectacle aussi fascinant que le sang remontant dans la shooteuse après la tirette.

Merde, ce mec à des poumons de plongeur! Il reste en apnée, tentant de conserver la fumée dans ses poumons. Ça commence à m’inquiéter, il devient tout blanc. Les yeux exorbités, pris de spasmes, il toussote renvoyant des volutes de fumée puis, n’y tenant plus, il recrache un monumental nuage à l’odeur âcre. Le voilà tétanisé sur sa chaise, l’air salement défoncé, un sourire béat illuminant sa face de rat, heureux.

Plutôt impressionné, je passe à mon deuxième essai. X me chauffe le caillou, j’aspire d’un seul coup toute la fumée, la retient une dizaine de secondes dans mes poumons, et soudain: paf, c’est la baffe. Ma bouche est anesthésiée, mon cerveau s’enveloppe d’une brume électrique jouissante. Tout clignote dans ma tronche. D’un robinet coule une musique superbe, tout est clair, je suis fort, le monde m’appartient. Mais pas longtemps. L’état de grâce disparaît après deux minutes. Reste une excitation proche d’un simple sniff.

Au final, l’effet du caillou fumé est très proche de celui d’un fix de coke, quoique moins puissant et peut-être plus court. Bref, c’est très bon mais pas nouveau. Après dix minutes de bavardage futile, arrive l’angoissante mais si classique descente de coke. Nous la retardons grâce à trois autres cailloux, mais sans jamais retrouver l’effet fantastique de ma première baffe

Frustré, mélancolique, je quitte X. Je n’ai plus envie de parler, je veux rester seul au calme. X ne me retient pas, et pour cause, il attend avec impatience que je me casse pour récupérer l’huile de coke qui a abondamment coulé dans le doseur. C’est l’ambiance-reine chez les crackers: «tout pour ma gueule».

La suite est moins rose. Cette petite virée m’avait redonné goût à la coke. Le mois suivant, mon salaire complet partit en fumée. A court de tunes, je commençai à emprunter, puis à utiliser le compte en banque de mon taf. De retour dans les rues mal famées, je me suis remis à galérer comme jamais. La défonce au caillou revenant très cher, je repris le shoot pour être bien sûr de ne rien perdre.

Le crash du vétéran

La descente aux enfers était bien entamée quand après une nuit chargée, je fus pris d’une crise de convulsions qui m’envoya à l’hosto. J’étais lessivé physiquement, moralement et matériellement. Contraint à l’ exil, je me remet doucement de ce crash, tentant désespérément de comprendre, comment moi, un digne vétéran des drogues, j’ai pu me faire ainsi baiser la gueule. Dans les cauchemars qui rythment mes nuits, des cailloux (inaccessibles) ont remplacé les sachets d’héro, un doseur (fêlé) la shooteuse. Seule consolation, je ne souffre pas de manque comme avec l’héro. Bof.

Comment échapper au contrôle ?

Jusqu’en août 2016, le dépistage des stupéfiants ne pouvait avoir lieu que dans des cas précis :

•• à l’occasion d’un accident corporel ou mortel ;
•• suite à une infraction commise ;
•• en cas de « suspicion légitime » de prise de drogue ;
•• ou à l’occasion d’une opération ordonnée par le procureur.

Mais comme pour l’alcool, il est désormais possible d’être soumis à un dépistage stups sans aucune justification. Il est même possible d’être testé dans une voiture à l’arrêt. Ces tests font généralement suite à une infraction mais on peut tomber sur un contrôle aléatoire.

À court terme, l’objectif des autorités est de multiplier par 2 le nombre de dépistages (126 000 en 2015), puis d’augmenter la cadence pour que la probabilité d’être soumis à un dépistage de stups soit la même que celle de l’être à un alcootest (10 millions de tests/an).

Quelques règles élémentaires devraient vous aider à maximiser vos chances de ne pas être dépisté:

•• rouler dans un véhicule clean et en règle ;
•• conduire sans commettre aucune infraction ;
•• soigner sa « dégaine » dans la mesure du possible, pour ne pas correspondre au stéréotype du gars qui se défonce tel que se le représentent les forces de l’ordre ;                                                    •• ne pas laisser fumer du cannabis dans son véhicule ;
•• se faire conduire par une personne sobre dans un événement festif ;
•• utiliser une application d’aide à la conduite de type Waze et programmer ses déplacements.

Si vous faites gaffe à tout ça, vous limiterez très sérieusement le risque d’un contrôle.

Selon la loi, c’est au conducteur de prélever lui-même l’échantillon de salive, ne laissez pas les forces de l’ordre fourrer leurs sales pattes dans votre bouche.

Vous trouverez sur Internet de nombreuses méthodes de tromper ces tests de dépistage. Reste à savoir laquelle est efficace, car il n’y a n’a pas encore d’études scientifiques pour les évaluer. Avant, un bain de bouche soigneux et prolongé était fréquemment cité comme étant efficace, mais d’autres témoignages disaient que dans leur cas, cela n’avait pas marché.

Petit florilège des méthodes supposées fausser les résultats du test :

•• bain de bouche à l’Éludril®, à la Listerine® ou au Paroex® ;
•• bain de bouche au peroxyde d’hydrogène (eau oxygénée), surtout ne pas l’avaler ! ;
•• bain de bouche à l’huile d’olive citronnée ;
•• produit commercial de type « kleaner » ;
•• garder en bouche des bonbons Altoids et lors du prélèvement de salive, frotter le bâtonnet contre eux ;
•• mâcher des chewing-gums en conduisant, de préférence au bicarbonate de soude ;
•• se rincer soigneusement la bouche à l’aide de Gaviscon®, un produit contre l’acidité vendu en pharmacie ;
•• juste avant un contrôle, mettre une goutte d’huile essentielle de menthe poivrée sur sa langue et se faire saliver ;                                                                                                                                      •• consommer des fruits acides, voire de l’acide citrique ;
•• manger du Nutella avant le contrôle.

Attention, aucune de ces méthodes ne vous garantit de passer au travers, utilisez-les en dernier recours. De toute façon, restez connectés, il serait bien étonnant que parmi les millions de personnes visées par ces tests dans le monde entier, aucune ne trouve LA méthode pour les neutraliser ou qu’une entreprise ne commercialise un produit miracle réellement efficace (avis aux amateurs, celui qui trouve la formule deviendra riche !). C’est juste une question de temps.

Autant il est moralement condamnable de fournir un moyen de neutraliser un éthylotest, autant ce serait presque un devoir pour les tests antidrogue, tant ils sont arbitraires et scandaleux.

Bon à savoir

•• Le fabricant du test recommande de ne pas fumer ni manger dans les 15 minutes précédant le test, cela étant susceptible de fausser le test.
•• Une étude scientifique précise qu’une infection buccale modifie les résultats de l’analyse en faisant baisser le taux.
•• Une autre étude à constaté que la concentration en drogues d’un échantillon salivaire est jusqu’à trois fois supérieure à celle obtenue après stimulation acide de la salive.
•• Une salive trop « visqueuse » est plus difficile à analyser.

ATTENTION

Si vous êtes convoqué à la gendarmerie ou au commissariat pour une affaire liée de près ou de loin aux stupéfiants, n’y allez pas en voiture, les pandores risquent d’en profiter pour faire un petit dépistage gratuit. Plusieurs personnes ont ainsi perdu leur permis. Plus largement, si dans votre quartier ou votre village vous êtes plus ou moins connu pour usage de drogues, réfléchissez à deux fois avant de prendre le volant. Ou déménagez.

Dossier réalisé par JI.AIR

Brèves (été 1993)

Bloody yeuxUSA : au Kansas, trois dealers de crack ont été condamnés à la peine capitale, ayant été reconnus responsables de la mort de onze toxicos. Et comme là-bas ils ont le sens de l’humour, ils seront exécutés par injection toxique ! Et si on envoyait les responsables Français de la contamination HIV par transfusion se faire juger au Kansas ?

main jeterLes Pays-Bas violemment critiqués sur leur politique de répression des stupéfiants par un rapport de l’ONU. Les Néerlandais contestent les conclusions de ce rapport, et suggèrent qu’il a été rédigé sous la pression de la France. Il s’agirait d’une rivalité entre Paris et La-Haye, tous deux candidats au siège d’Europol, la future police européenne. (bizness is bizness …)

mainsRecord pulvérisé le 9 janvier dernier, avec la saisie de 14 tonnes d’héroïne afghane par l’armée turque sur un cargo en provenance du Pakistan. Sur le marché parisien, ça représenterait plus d’un milliard de “képas” !!!

Tête BDAprès Michelle BARZACH et Brice LALONDE, c’est Monique PELLETIER, ancien ministre de la famille, qui se déclare favorable à l’extension des programmes de méthadone et d’échange de seringues. Elle déclare que face au sida, “il faut passer à la vitesse supérieure”.

BaiserNaissance du MLC – Mouvement de Légalisation Contrôlée – animé par P. DOUGUET, avec la participation de l’avocat F. CABALLERO et du professeur Willy ROZENBAUM . Cette association entend promouvoir une alternative à la prohibition et à la répression, constatant que “l’interdiction des stupéfiants transforme leur usage en fléau”.

Bloody colère yeuxLe célèbre professeur CHORON bientôt au MLC ?
Extrait de son interview dans le journal BEST : “l’ivrogne chez nous, il a le nez rouge, il est un peu gonflé, là-bas l’opiomane est un peu maigre, c’est toute la différence ; mais il n’y a jamais de folie, la folie vient de la prohibition”.

Tchao HELNO ! Le chanteur des Négresses Vertes nous a quitté , victime d’une overdose (d’un produit toxique sans doute coupé à l’héroïne ?).

ASUD04_BusA Paris, l’action de “Médecins du Monde” est régulièrement troublée par certains services de police (sans doute dopés par les déclarations fracassantes de messieurs Quilès et Broussard) : interpellation des “toxs” à la sortie du bus de prévention et destruction des kits . On est décidément bien loin de Liverpool où la police oriente les toxicos interpellés vers les lieux d’échange de seringues et autres centres d’accueil . En effet, elle estime que sa mission consiste aussi à protéger la population du sida.

Bonne nouvelle : le ministre de la santé B. KOUCHNER a annoncé avant son départ que tous les séropositifs seront pris en charge à 100% par la sécurité sociale. Malheureusement ça ne changera pas grand chose pour les toxicomanes les plus marginalisés et sans aucune couverture sociale.
(M Kouchner est désormais remplacé par Mm Veil)

Incroyable : plusieurs toxicos strasbourgeois en ont été réduits (faute de places dans les centres d’accueil) à réclamer leur incarcération ! En effet , la région est confrontée à une forte augmentation de la toxicomanie et les rares structures médicales sont débordées, reste donc … la prison ! Connaissant les conditions de “vie” désastreuses des toxicos en milieu carcéral, on imagine l’ampleur du désespoir de ces personnes.

ASUD04_DoubleCeci est le sigle “de la “Double U.O.”, héroïne laotienne vendu aux G.I.’s américains durant la guerre du Vietnam.

Barbès en état de siège : Depuis la déclaration de guerre à la drogue faite par Messieurs Quilès et Broussard , le quartier de la Goutte d’Or est soumis régulièrement au quadrillage de la police, et l’arrivée de M. Pasqua au ministère de l’Intérieur ne fait qu’aggraver cette “politique” de harcèlement dont sont plus particulièrement victimes les toxicos.
Bilan de ces spectaculaires opérations anti drogues : dealers arrêtés : 0 ; quantité de drogue saisie : 0 ; restent quelques toxicos et quelques étrangers sans papiers en garde à vue . A la brigade des stups on appelle ça de la déstabilisation du deal de rue ! A part ça le prix du gramme d’héro dans le quartier est toujours à 500 francs, et largement disponible.

L’Italie dépénalise : après trois années de politique hyper-répressive qui a envoyé sous les verrous des milliers d’usagers, le gouvernement fait marche arrière en dépénalisant l’usage de stupéfiants. Ce nouveau décret a même été confirmé par un référendum (55% pour). Reste que la quantité de drogue tolérée est très faible : un dixième de gramme pour l’héroïne, un demi gramme pour le shit . Alors soit l’héroïne italienne est d’une pureté exceptionnelle, soit nos amis italiens sont condamnés à de multiples allers-retours …
Mais bon c’est quand même un progrès !

Une fois de plus la France est à la traîne en restant le seul pays de la C.E.E (avec le Luxembourg) à emprisonner les toxicos pour simple usage de stupéfiants.

Flash de dernière minute : aujourd’hui, 7 mai 1993, nous apprenons la démission de Mme Georgina Dufoix de la DGLDT ! Est-il vraiment nécessaire de préciser qu’ASUD se réjouit de cette nouvelle ?

ASUD04 VIH capote nez wolinskiAprès dix-huit mois de négociations serrées avec les pouvoirs publics, Médecins du Monde a mis en service un bus d’échanges de seringues fonctionnant trois soirs par semaine. Le besoin est réel, Strasbourg compte plus de 3000 toxicomanes dont un tiers est séropositif et les structures d’accueils spécialisées sont insuffisantes.

Pavot islamique : La police de Téhéran a découvert (puis détruit !) plusieurs plans de pavot dans les jardins du mausolée de l’Imam Khomeiny. Pendant ce temps les nombreux toxicos iraniens continuent de subir une répression féroce (exécution, incarcération massives)

Essai comparatif des Kits

ASUD a essayé pour vous… les différents kits de prévention disponibles (difficilement) à Paris. Outre le fait qu’ils sont rares, ces kits sont souvent incomplets : aucun d’entre eux n’a prévu la “cuillère”, pourtant elle aussi source possible de contamination du VIH. (Serait-il si compliqué de concevoir une sorte de capsule métallique autocassable après usage ?). Seul le kit suisse propose de l’acide ascorbique (qui remplace le citron), bien sûr on attrape pas le SIDA avec du citron, mais en revanche, l’on peut se choper tout un tas d’autres infections. L’intérêt de ces kits, mis à part celui évident de disposer d’un matériel d’injection stérile, est qu’apparemment la police serait (?) “sensible” au fait qu’un toxico utilise du matériel protégé : par exemple, le Kit MDM (Médecins du Monde) avec sa boîte rigide les rassure, car lors d’une fouille ils ne risquent pas de se piquer sur une aiguille baladeuse, et il a un caractère vaguement officiel (il contient un petit mot explicatif du Ministère de la Santé).

Mais attention, on ne vous garantit rien ! Avec la police, tout est relatif, alors kit ou pas, restez prudents !

KIT MDM
GRATUIT
DISPONIBLE AU BUS ET AU DISPENSAIRE
KIT STERIBOX
Prix : entre 5 et 10 F
VENTE EN PHARMACIES
D’IVRY (94)
(bientot dans le 92)
KIT AIDES
GRATUIT
CHEZ AIDES
247, RUE DE BELLEVILLE 75019 PARIS
KIT FLASH
PRIX 2,5FS=10FF
EN VENTE EN SUISSE
PACKAGING DES KITS BOITE CYLINDRIQUE EN CARTON DUR JOLIE BOITE EN CARTON SOUPLE ILLUSTREE PAR WOLINSKI SACHET PLASTIQUE ASSEZ VOLUMINEUX BOITE EN CARTON FORMAT PAQUET DE CIGARETTE
MATERIEL D’INJECTION 2 INSULINES 1CC. 2 INSULINE 1CC ;
avec BOITE POUR SERINGUES USAGEES
1 SERINGUE 2CC.
Avec 1 AIGUILLE détachable microlance
2 INSULINES 1CC ; avec 4 AIGUILLES détachables : 2 courtes et 2 longues
TAMPONS alcoolisés 2 2 1 2 + 2 COTON
CAPOTE 2 1 2+2 SACHETS DE GEL LUBRIFIANT 1
EAU NON 1 CAPSULE D’EAU STERILE NON NON
ACIDE ASCORBIQUE NON PAS ENCORE MAIS
EN PREVISION
NON 1 gramme D’ACIDE ASCORBI- QUE
CONCLUSION POUR : boite rigide bonne disponibilité, bonne tolérance avec les filcs

CONTRE : encombrante et pas d’acide ascorbique

POUR : beau design, ce kit devrait s’améliorer (acide et coton)
Le prix doit passer à 5F

CONTRE : fragilité de la boite
(94 seul point de vente)

POUR : le seul kit avec une seringue et CC

CONTRE : encombrant, il manque une autre insuline de 1CC et l’acide ascorbique

POUR : c’est le plus complet et le plus pratique

CONTRE : sans eau, introuvable en France…

L-627 suite

Le 26 octobre M. Broussard a été nommé responsable de la lutte contre la drogue. La presse s’est largement fait l’écho de ses déclarations fracassantes sur la guerre totale qu’il compte mener contre la la drogue. Il déclare que les “stups” sont « assez bien préparés à la lutte contre le grand trafic et le blanchiment de l’argent, et que donc la répression se concentrera sur le deal de rue ! »

Les toxicos comprendront tout de suite : la chasse (aux toxs) est ouverte. Elle sera impitoyable pour atteindre l’objectif fixé par notre cher Ministre de l’Intérieur : 50 000 interpellations, soit une augmentation de 65 % par rapport à l’année précédente !

Charmant programme qui promet une chaude ambiance dans les rues parisiennes, le film “L-627” n’y est pas étranger.

AVEC TENDRESSE…

Le lendemain de la nomination de M. Broussard aux stups, c’était au tour de M. Kouchner de monter au créneau, déclarant qu’il allait porter à 10 le nombre des programmes Méthadone (il n’y a actuellement que 50 places !), et créer des réseaux de médecins généralistes.

Une petite phrase a particulièrement retenu l’attention d’ASUD : « Il faut soigner les toxicomanes avec tendresse » (sic !).

On espère que M. Broussard l’a bien entendue… Et aussi que toutes ces belles déclarations se réaliseront rapidement et concrètement ?

Festival Rock et Sida

Les 6,7 et 8 novembre a eu lieu au Café de la Danse le festival Rock et Sida, organisé par Sidathontour et Act-up qui avaient invité ASUD à y participer.

Enfin la prévention du SIDA s’adressait aussi aux usagers de drogues (jusque là toujours ignorés). Enfin l’usage de capotes et de seringues stériles étaient associés pour une prévention plus efficace.

Ceci d’autant plus que la consommation de dope est bien souvent intégrée a la culture Rock : “Sex and Drugs and Rock & Roll “l’hymne de Ian Dury est apparemment toujours d’actualité ! Il est donc capital de donner une information complète sur le “fix propre” (qui ne se limite pas à l’utilisation d’une pompe stérile), mais sans oublier les risques de contamination par voie sexuelle. En effet, si beaucoup de “toxs” ont changé leur mode d’utilisation de la shooteuse, nombreux sont ceux qui négligent de se protéger lors de rapports sexuels (contrairement aux idées reçues, les “toxs” ont aussi une vie sexuelle active).

Sachant que la population toxico est celle où le SIDA progresse le plus dramatiquement, on réalise l’urgence d’assurer enfin une prévention digne de ce nom.

Ces trois jours furent un succès, pour tous : salle comble chaque soir, ambiance très chaude mais sans dérapage, concerts furieux de quelques-uns des meilleurs groupes alternatifs français (avec une mention spéciale à Chihuahua, Beurks’ Band, Pigalle et bien sûr BB DOC !).

Entre chaque concert, de nombreuses personnes rendirent visite à ASUD où elles purent se procurer, outre notre journal, des plaquettes informatives sur le Safe Sex et le Fix propre (avec le Kit correspondant) Certains furent déçus, pensant qu’ASUD aurait pu leur fournir le “carburant”… Non, désolé, ASUD n’est pas un “pool de dealers” !!! – Beaucoup qui espéraient depuis longtemps qu’un groupe d’auto-support existe… et agisse, nous ont vivement encouragés à tenir bon ! Merci à Act-Up de nous avoir invités. Merci aussi à Aides qui nous a fourni les kits “Fixez propre”.

L-627 Réaction à chaud

Un nouveau film, L627 (article réprimant l’usage et le trafic des stups) fait actuellement beaucoup parier de lui.

Et bien que ce film trouve un ton assez juste, décrivant relativement bien le deal de rue et, parait-il, les conditions de travail des inspecteurs des stups, le message qui s’en dégage est toujours le même : si on leur en donnait les moyens, ces flics, présentés comme une espèce de croisés des temps modernes, aurait tôt fait de terrasser l’horrible “pieuvre”. Je ne doute pas de la réalité décrite par B.TAVERNIER sur les mille petites misères de l’administration, l’incompétence et la bêtise des chefs que subissent ces malheureux policiers. Mais bon, il ne faudrait pas oublier que les stups bénéficient déjà de pouvoirs exorbitants : perquisition 24 heures sur 24, garde à vue de 4 jours, etc …

Ce qui ne les empêche pas de réclamer encore plus d’effectifs, plus de pouvoir, pour toujours plus de répression, alors que la France détient déjà le record des “toxicos” emprisonnés, et que Paris est une des villes (La Ville) d’Europe où le taux de policiers par habitant est le plus fort ! D’autre part, B. Tavenier nous ressort le cliché du dealer qui à peine serré est aussitôt libéré mais lorsque cela arrive, c’est que ce même dealer est un indicateur; et je comprends donc mal que les flics s’en étonnent. La Justice française est extrêmement sévère pour les délits de drogues. (un petit dealer usager prend facilement quatre ans ferme).

Le film L 627 qui entend montrer avec le maximum de réalisme le travail quotidien des flics de base face au trafic des drogues, a soulevé un enthousiasme quasi unanime… notamment chez les policiers… fort bien : les “cowboys” ont aimé le western reste à savoir ce qu’en pense les “indiens”…

…Il aurait long à dire sur les véritables conditions d’interpellation des toxicos, qui se résument systématiquement par des brutalités (parfois très violentes), des humiliations et insultes diverses, et bien sûr le chantage! Le brave flic sympa et “tellement humain», héros de L-627 est décidément bien rare dans les rues parisiennes. Non bien sûr,les flics adoreront votre film Mr Tavernier, sans aucun doute, contrairement aux toxicos de la Goutte d’Or qui ont déjà subi deux rafles successives (et médiatiques) avec interpellations en masse, suite à votre film. Je crois que les conditions de vie (voire de survie) des usagers sont bien plus dramatiques (SIDA, PRISON, MARGINALISATION) que les petites tracasseries administratives que subissent nos malheureux flics. Il existe en France un quasi‑génocide des usagers drogues, dans une indifférence total alors Mr TAVERNIER ! À quand un film qui dénoncerait ce scandale ?

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