1968-2018 : c’est pour quand la libération des usagers de « drogues » ?

Le mouvement politique, social et culturel, qu’on a appelé le 68 (irréductible au seul mai français et aux luttes des étudiants) a débouché dans les années suivantes sur des conquêtes majeures pour les acteurs de ce mouvement multiforme. Les ouvriers ont obtenu des hausses de salaire, des meilleures conditions de travail, des droits syndicaux. Les pacifistes et opposants au service militaire ont obtenu la fin de la conscription obligatoire. Les féministes ont obtenu le droit au divorce, à la contraception et à l’avortement, et la liberté de vivre sans une tutelle masculine. Les homosexuels ont obtenu le droit au mariage, le droit à l’adoption et à la procréation assistée (pour les couples lesbiennes …).

Parmi tous les acteurs de ce mouvement revendiquant tout simplement des droits humains, de la reconnaissance, du respect, l’ouverture à une autre vision de la société et des individus, il reste aujourd’hui des grands oubliés, les « drogués », qui partagent cette dénégation avec les « fous » et les « taulards ». Or, par-delà l’étiquette infâmante, l’usage de substance psychotropes classées prohibées (sensiblement les mêmes que celles consommées légalement sur prescription médicale, et donc autorisées) concerne des millions de personnes en France, des centaines de millions dans le monde. Une consommation de masse qui s’est répandue comme une trainée de poudre, véhiculée par la génération de 68.

Le mouvement hippy, underground, des fils des fleurs, spontanéistes et situationnistes s’abreuvait des nouvelles substances psychotropes ramenées d’Orient (cannabis, héroïne) ou d’Occident (cocaïne, plantes psychédéliques) par des voyageurs partis à la découverte de nouveaux horizons. Ce mouvement a introduit et rapidement massifié la consommation de substances psychotropes parmi les populations occidentales, jusque-là « mono-droguées » au seul alcool.

Cinquante ans après 68, nous savons aujourd’hui que « la guerre à la drogue », judiciarisée par les lois de 1970, a été et est une guerre idéologique et morale menée contre les consommateurs de psychotropes, accusés par leurs comportements subversifs de miner l’ordre social. On disait ça de la sexualité hors mariage, de l’homosexualité, avant que les changements de comportements et de mentalité n’imposent aux pouvoirs publics les changements des lois. « Sexe, drogue, rock’n’roll » : depuis cinquante ans, ce triptyque de moyens menant au plaisir fait partie du quotidien de millions de personnes, normalement intégrées dans la société. Sans pour autant casser le mur dressé par l’Etat, avec sa police, ses juges et ses matons, qui enferme encore les « drogués » dans une clôture de lois répressives et injustes, socialement et racialement. Il serait temps que les changements sociaux intervenus dans les usages de psychotropes se traduisent par des lois. La libération des usagers de « drogues » est à l’ordre du jour en ce printemps 2018.

Table Ronde avec :

Jean-Pierre Galland, ancien président du CIRC

Michel Sitbon, éditeur et écrivain

Vincent Benso, membre de Techno +

Béchir Bouderbala, président de NORML France

Laurent Bazin, anthropologue, CR au CNRS-CLERSÉ/CESSMA, co-fondateur et co-président de l’association Le paria & Mohamed Bridji, cuisinier, co-fondateur et co-président de l’association Le paria, ex-taulard, victime ordinaire de violences policières = « Un témoignage sur l’insécurisation des classes populaires »

Discutant : Alban Belkaim, journaliste à Bondy Blog

 

Lieu et horaires :

Amphithéâtre de l’EHESS, 105 bd. Raspail, 75006 Paris

17h à 20h

Organisateurs :

Mariana Broglia de Moura, anthropologue, doctorante à l’EHESS

Renaud Colson, juriste, MC à l’Université de Nantes

Anne Coppel, sociologue, présidente honoraire d’ASUD

Bertrand Lebeau, médecin addictologue

Julia Monge, anthropologue, doctorante à l’EHESS

Fabrice Olivet, directeur de l’Auto Support des Usagers de Drogues (ASUD)

Alessandro Stella, historien, directeur de recherche au CNRS

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