Quand les Verts font le joint

Qu’ils soient de droite ou de gauche, nous les avons tous apostrophés lors des différentes échéances électorales. Ils nous ont parfois répondu, à droite, des fadaises, à gauche, des foutaises… Certains nous ont amusés avec la sempiternelle ouverture du débat sur les drogues… Mais en définitive, le seul parti à nous avoir soutenus indéfectiblement lors de nos démêlés avec la justice, le seul à avoir partagé des idées et proposé des actions, ce sont Les Verts.

À peine avions-nous reçu le faire-part annonçant la naissance du Circ que nous prenions rendez-vous avec Jean-Luc Bennahmias, un des pionniers de la lutte pour la dépénalisation du cannabis, d’abord dans Antirouille (magazine de lycéens) puis dans la Gueule ouverte (journal écologique), mais aussi en tant que représentant des Verts Europe qui, en avril 1991, proposaient de mettre à l’étude « la dépénalisation complète, avec légalisation des produits ».

Les années complices

Dès 1995, alors que le préfet de police interdisait le rassemblement de l’Appel du 18 joint, Les Verts soutenaient le Circ, un soutien qui déboucha sur une garde à vue à la brigade des stups. Il n’en fallait pas plus pour nouer des liens qui se sont resserrés lorsque Jean-Luc Bennahmias devint Secrétaire national des Verts en 1997. Cette année-là, échaudés par les interdictions de l’Appel du 18 joint, les jeunes Verts se substituent au Circ pour la demande d’autorisation, mais essuient un refus du préfet de police d’autant moins compréhensible que Jean-Pierre Chevènement était le ministre de l’Intérieur du tout nouveau gouvernement socialiste et Dominique Voynet, sa ministre de l’Environnement.

L’année suivante, Act Up est accusé d’avoir présenté les stupéfiants sous un jour favorable en distribuant un tract « J’aime l’Ectasy, je suis pédé aussi ». Quant au Circ, il est convoqué devant la 16e chambre correctionnelle pour avoir distribué des pétards à l’Assemblée nationale, et le lendemain, devant la même chambre mais en compagnie de l’Arev, d’Asud, de Chiche et des Verts, pour avoir bravé l’interdiction de l’Appel du 18 joint 1997.

Unis contre la loi de 70

C’en est trop ! Les Verts participent activement à la création du Collectif pour l’abrogation de la loi de 1970 (Cal 70), mouvement fourre-tout où se côtoyaient tous les acteurs antiprohibitionnistes. Pour fêter ça, leurs députés déposent un projet de loi afin d’abroger l’article L630 de la loi qui nuit gravement au débat sur les drogues, un projet identique sera initié par Jean-Pierre Michel, député du Mouvement des citoyens (MDC).

« … Depuis longtemps nos travaux ont inspiré les Verts, surtout Chiche, au point qu’on ne sait plus bien aujourd’hui qui de Chiche, des Verts ou du Circ défend les propositions de l’autre… » : ainsi m’exprimai-je devant le Conseil national des Verts où je plaidais pour représenter la voix de l’antiprohibition lors de la campagne des Européennes. Dans le fascicule publié pour l’occasion, « Et si on légalisait les drogues ? », les Verts (et le Circ) proposaient d’abroger le L630, de décriminaliser l’usage de toutes les drogues, de retirer le cannabis du tableau des stupéfiants, de reconnaître l’autoproduction et de définir un cadre légal « pour sa production et sa distribution à des fins commerciales ».

Concernant les autres drogues illicites, les Verts militaient pour l’ouverture d’un vrai débat au parlement sur l’accès légal, selon des modalités différenciées, aux produits actuellement classés au tableau des stupéfiants.

Les Verts partageaient avec le Circ, les associations de réduction des risques ou encore la Ligue des droits de l’Homme, la même analyse critique de la prohibition et proposaient pour en sortir de légaliser le cannabis. Une position défendue avec fougue par Noël Mamère lors de la campagne présidentielle de 2002 dans laquelle le Circ s’est illustré en organisant l’opération « Sortez-les du placard ».

Le bug de l’an 2000 ?

Alors qu’avec Jean-Luc Bennahmias nous étions sur la même longueur d’ondes, l’arrivée de Dominique Voynet à la tête des Verts en 2001, puis de Gilles Lemaire en 2003, a stoppé net une coopération fructueuse entre le parti et les associations représentant les usagers. Cependant, tout lien ne fut pas rompu et on se souvient de l’engagement d’Anne Coppel dans la campagne des Européennes de 2009.

Après dix ans de silence radio, Esther Benbassa, sénatrice EELV, dépose (à la grande surprise des associations qui n’ont pas été consultées) une proposition de loi « autorisant l’usage contrôlé du cannabis », proposition qui a été saluée par tous comme une initiative courageuse et inédite. En effet, c’est la première fois qu’un parti politique propose de légaliser le cannabis, une proposition « bancale » pour les premiers concernés – les consommateurs – mais qui ne demande qu’à être améliorée si l’on veut satisfaire toutes les parties en jeu.

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