Que faire lorsqu’on a pris un risque avec l’hépatite C ?

L’hépatite C est une maladie qui reste mal connue, en particulier parmi les plus jeunes usagers. Actuellement, les médecins s’alarment du nombre de personnes qui ne consultent qu’une fois arrivées au stade de la cirrhose. Le test de dépistage est pourtant devenu très accessible. Nous le recommandons même aux non-injecteurs. En cas de positivité et si l’hépatite reste active, un suivi médical s’imposera avec, peut-être, une ponction et un traitement à la clé.

Si l’hépatite C, dont la contamination se fait par le sang, touche 60 % à 65 % des injecteurs(1), c’est parce que les pratiques d’injection exposent très rapidement les usagers de drogue à cause du partage des seringues et, dans une moindre mesure, à cause du partage du reste du matériel (eau, préparation, cuillère, filtre). Certaines études suggèrent pourtant qu’au-delà de la classique figure de l’héroïnomane ou du « toxico », une contamination existe chez les non-injecteurs.
Ces cas restent obscurs : environ 10 à 20 % des usagers n’ayant jamais eu recours à l’injection seraient contaminés.
Ont-ils passé sous silence les quelques shoots qu’ils auraient fait ou bien ont-ils pris des risques sans s’en rendre compte ? Toujours est-il que même lorsque l’on est un usager de drogues dites festives, on devrait faire le test de l’hépatite C.
Il faut savoir que plus le dépistage et éventuellement le traitement sont précoces, plus les chances de guérison sont fortes : il est donc fortement conseillé de se faire dépister le plus tôt possible.

L’hépatite C ne touche pas que les « toxicomanes »

Les usagers de drogues non-injectables ne sont pas à l’abri d’une contamination par le partage de doseurs, peut-être des pailles à sniffer. Lorsque l’on vit en collectivité ou si l’on sort en rave ou en festival, il y a un risque accru de contacts sanguins par le partage d’accessoires de toilette contaminés (surtout rasoirs, éventuellement brosses à dents… ). Pour le tatouage et le piercing, demandez des garanties sur la stérilisation du matériel. On peut donc très bien attraper l’hépatite C et son virus le VHC sans être un « toxicomane » labellisé.

Un test anonyme et gratuit

Tous les centres de dépistage anonymes et gratuits (CDAG) pratiquent maintenant, en plus du VIH, le dépistage du VHC, le virus qui provoque l’hépatite C. C’est bien pratique pour les plus jeunes, qui ne devront ni payer ni décliner leur identité, juste remplir un formulaire anonyme. Certains CDAG ont une consultation pour les maladies vénériennes et peuvent vous orienter pour une contraception, tout ceci gratuitement.
L’autre solution consiste à se faire prescrire le test par son médecin et à le faire dans un laboratoire d’analyses. Il sera remboursé à 100 %.
Nombre d’usagers ne se font pas dépister pour l’hépatite C, parce qu’ils pensent qu’on ne peut rien faire contre l’hépatite C sans passer par une ponction biopsie du foie (PBH). Or, cet examen qui effraie les usagers, souvent à cause des rumeurs entendues, n’est pas toujours nécessaire et ne concerne que les personnes atteintes d’une héptite C, dite active ou agressive, avec des transaminases élevées. Ces cas risquent, une fois sur trois, d’évoluer vers une cirrhose, parfois plus rapidement qu’on ne le croit. Tous les usagers devraient d’abord se faire dépister par une simple prise de sang, puis devenir très attentif sur l’hygiène en cas de positivité et démarrer un suivi médical.

Et si je suis positif ?

Un test positif n’est pas une catastrophe. Le suivi médical de l’hépatite est remboursé à 100 % et l’ hépatite restera parfois bénigne.Pour les cas plus graves les traitements actuels permettent, sous certaines condittions, une guérison sans séquelles. Au pire une invalidité pourra être prise en compte.

En cas d’hépatite active

Si vous avez la malchance d’avoir une hépatite agressive, la ponction est un passage obligé pour l’obtention d’un traitement. Cet examen est le seul qui permet de mesurer les dégâts subis par le foie et l’activité du virus (score Metavir). L’accès au traitement reste moins évident pour les « toxicomanes » et les consommateurs d’alcool, toutefois l’attitude des médecins évolue.
L’équipe du centre La Mosaïque à Montreuil nous a permis de rencontrer trois usagers qui ont accepté de témoigner pour démystifier la biopsie (PBH en jargon médical) : un examen entouré de beaucoup de rumeurs.

La ponction du foie (PBH)

Il existe deux moyens de ponctionner : la voie transjugulaire (par la veine jugulaire) est rarement utilisée, la voie transpariétale (directement dans le foie) est la plus fréquente. Une simple anésthesie locale est nécessaire. Pour les personnes trop angoissées, l’anésthesie générale est possible. Abordez la ponction avec calme. Il ne faut pas bouger et éviter de mettre la pression sur le médecin, car une ponction sans douleur nécessite de la dextérité. Evitez de regarder l’aiguille de ponction.
Pour préparer la ponction, on vous demandera d’arrêter de boire. Cette demande se justifie car les effets de l’alcool risquent de fausser l’interprétation de la ponction.
La parole est à Jacky, Odé et Patrick, tous les trois usagers confirmés.
Dans deux cas, la ponction s’est bien déroulée. Dans un autre cas, elle s’est moins bien passée. Selon nous, quatre fois sur cinq, il n’y a aucun problème.

Témoignages

Les médecins ont proposé à Odé une ponction transjugulaire :
« Ça ne s’est pas trop mal passé, ça m’a quand même pris une journée. C’est le temps qu’il faut prévoir, je pense. Les résultats sont arrivés trois semaines plus tard, au score Metavir, j’atteignais le stade F4, celui de la cirrhose. J’étais catastrophé, je croyais aller bien. A l’époque, je buvais. Le traitement n’était pas envisagé tant que je n’étais pas stabilisé avec l’alcool. On m’a dit de refaire une biopsie dans deux ans. C’est ce que j’ai fait. La deuxième ponction s’est moins bien passée. Le jour du rendez-vous arrive et, là, grosse erreur, je n’avais pas fait la prise de sang pour le temps de saignement (test qui mesure la vitesse de coagulation du sang). Pourtant, je leur avais dit que j’étais très dur à piquer. Du coup, tout le monde s’énerve parce qu’ils n’arrivent pas à me piquer.Ça dure deux heures, on me charcute, on m’emmène au bloc où l’on n’arrive toujours pas à me piquer. Le toubib arrive et me dit : “Vous saviez bien que vous aviez une biopsie à faire !” Je lui réponds qu’on arrive pas à me piquer et que je les avais prévenus. Alors là, le toubib craque et me dit : “Tu changes de crémerie”. Rideau. J’ai tout repoussé à avril 2000. »
Le tuyau d’Odé aux Asudiens : « Ne faites pas la prise de sang pour le temps de saignement le jour-même de la ponction, mais allez-y avant. Vous serez moins stressé et pourrez rencontrer l’équipe médicale, ce qui vous permettra de voir comment ils sont et comment ils piquent. »

Dédramatiser la biopsie

Autre histoire, celle de Jacky : « J’ai fait un dépistage en 1997. A l’arrivée, on m’a dit : “Vous avez la C”, et on m’a expliqué gentiment ce que c’était. On ne m’a pas affolé.Mon dossier a été remis au médecin qui me suivait déjà pour la substitution. C’est lui qui m’a donné des explications pendant les consultations et m’a orienté vers l’hôpital pour une biopsie. On m’a dit que c’était une aiguille qu’on met dans le foie. Tout s’est passé très vite et plutôt bien. Je suis arrivé la veille à l’hôpital, j’y ai dormi. Le lendemain, dans la journée, le médecin est passé dans ma chambre, accompagné d’une autre personne. Ils m’ont fait une simple anesthésie locale. J’ai senti la piqûre c’est tout. Je le referai sans problème. On m’a proposé de la Viscéralgine. J’ai bien dormi et, le lendemain matin, j’étais chez moi. L’intervention m’a plutôt redonné confiance dans le système de soins et j’étais content de l’avoir fait. Au final, j’ai eu un score Métavir F4, donc cirrhose. Depuis un mois, j’ai commencé la bithérapie Interféron et Ribavirine et, pour le moment, je supporte bien. En huit ans, j’ai déjà une cirrhose tu te rends compte ! Je dis à mes amis d’aller se faire dépister, de ne pas attendre. J’ai un pote qui a la ‘C’, l’autre jour je l’ai sorti d’un café et je lui dis : “Tu as une C non active, alors, ne la réveille pas avec de l’alcool !”
Le tuyau de Jacky aux Asudiens :« Désolé pour les jeunes internes qui ont besoin de s’entraîner à piquer, mais je vous conseille de vous faire piquer par un médecin expérimenté. En huit ans, je me paye une cirrhose, je conseille aux gens de se faire dépister vite ! »

Patrick a consommé pendant vingt années et a fait ensuite un passage à la 8°6. « Il m’a fallu huit ans pour me décider à me faire suivre pour le VIH et le VHC dépistés en 1984. Depuis 1996, c’est Métha et trithérapie pour le VIH. Il m’a fallu encore deux ans pour obtenir une PBH. Le médecin m’a dit : “On peut le faire maintenant parce que vous êtes stabilisé pour le VIH et que vous avez cessé de boire.”
Pour la ponction, on m’a donné les consignes suivantes : “Ça va prendre 24 heures. Vous devrez rester allongé. Vous amenez votre Méthadone et votre trithérapie.” Je suis donc arrivé à l’hôpital le matin à 10 h. J’ai posé mon sac dans la chambre, puis on m’a fait une prise de sang pour mesurer le temps de saignement. Petit repas dans la chambre et, un peu plus tard, une infirmière arrive et me fait une piqûre anxiolitique. Elle me dit de m’allonger. Le médecin arrive, me fait la piqûre d’anesthésie locale et me dit de tourner la tête pour éviter que je voie le matériel de ponction. Je n’ai rien senti au moment de la ponction. J’ai demandé si je pouvais regarder et j’ai vu que j’avais un pansement avec un peu de sang. On m’a donné deux Viscéralgine forte et on m’a dit de ne pas trop bouger le bras droit. A 19 h, j’en avais un peu marre, même s’ils m’ont très gentiment laissé mes clopes.
A 5 h du matin, j’ai demandé qu’on débranche le tensiomètre autour du bras qui me faisait mal. Autre problème, c’est très difficile de pisser dans un tuyau si on est allongé, je voulais me lever. Finalement, je suis sorti à 13 h après que l’on m’ait servi un repas. »

Le tuyau de Patrick aux Asudiens : « Pensez à pisser avant la biopsie car c’est difficile de la faire en position allongée. Dans le service où j’étais, le médecin est une femme qui pique bien, tous ceux que j’ai vu n’ont rien senti, il faudrait se passer les bons tuyaux. L’information sur la biopsie et l’interprétation du score Métavir, c’est mon médecin qui me les a données. A l’hôpital, on ne m’a pas dit grand-chose.»

1) Indicateurs et tendances, OFDT 1999, p. 143
Remerciements à Pactrick, Jacky, Odé, aux Docteur Goisset, Professeur Morcellin.

Commentaires (7)

    • Dieudonné colombe

      Bonsoir Amandine,

      Je voulais juste t’informer que ton commentaire apparaît sur Google quand on rentre tes noms et prénoms sur le moteur de recherche.

      • Bonjour,
        Effectivement il est bon de rappeler que nos pages sont indexées par les moteurs de recherche. Si vous ne voulez pas y apparaître pensez à utiliser un pseudo pour écrire ici.
        Toutefois nous nous interrogeons sur le but de votre commentaire. S’agit-il de prévenir Amandine ou bien bien la « fliquer » ?

        • Salut Modo,

          Sache que les leçons de morale venant de vous je me torche le cul avec.

          ASUD est agréé par le Ministère de la Santé ce qui permet surtout de ficher les consommateurs de substances illégales…

          • Bonsoir,
            Il n’y avait aucune leçon de morale dans le précédent message. C’est bien dommage qu’il ait été pris ainsi. Le mot mot « fliquer » était à prendre au 2nd degré et il avait était mis entre crochet à cet effet. Aucune raison de s’énerver.
            Au contraire, il s’agissait de savoir si ce commentaire était un message personnel pour Amandine, auquel cas la contacter directement aurait été plus approprié.

            Cette discussion est tout de même l’occasion de rappeler que oui ASUD respecte la vie privée mais aussi que l’histoire et l’objet de l’association est la représentation des intérêts des consommateurs de drogues notamment le service d’observatoire du droit des usagers. Ce site a fait l’objet d’une déclaration spécifique à CNIL dans ce but de protection justement.

            La plupart des internautes utilisent ici un pseudo mais suite à votre remarque, afin d’être plus explicite, le champ obligatoire nom sera renommé « nom ou pseudo ».

            Pour information, il existe sur notre forum, un sujet réservé aux témoignages et questions anonymes (http://www.asud.org/forum/posez-une-question/) pour lesquelles même le nom n’est pas requis.

            En espérant vivement que le ton virulant ne soit dû qu’à un quiproquo.

        • Dieudonné M’Bala M’Bala

          Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec * : Nom et adresse email ! :)

          Pourquoi Amandine a naïvement indiqué son nom ? Parce que c’est indiqué comme champ obligatoire…

          Pourquoi demander des informations personnelles pour poster un com ?

          Est-ce que vous conservez aussi les adresses IP ??

          Étant donné que vous êtes favorables au respect de la vie privée et à la liberté d’expression vous allez censurer mes deux commentaires… ;)

          Une petite quenelle en partant

  • Bonjour Amandine,

    il faudrait savoir si ta copine connait son statut , est-elle VHC + , si elle ne connait pas son statut , le risque est tout de même faible pour qu’elle soit contaminée et qu’en plus elle te contamine après un sniff. Mais dans l’absolu oui il y a un risque, meme si tu n’a pas de saignements chez toi , tu peux avoir de minuscules coupures.

    le mieux est de faire un test pour être tranquille et tout simplement connaitre son statut VHC ( par exemple dans un CDAG anonyme et gratuit) , tout en sachant que le risque est faible. mais surtout ne JAMAIS UTILISER LE MEME MATERIEL POUR SNIFFER ( chacun sa sniffette ) bon courage

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